Dans le cochon tout est bon

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Par | Penseur libre |
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La sagesse populaire le répète à l’envi.

Perso, je m’en voudrais de contredire la sagesse populaire, surtout quand je suis d’accord avec elle. Quoique sur la foi de certains écrits dont les auteurs n’ont toujours pas été sérieusement identifiés et dont les complices courent toujours, il en va autrement pour des catégories de personnes qui prennent pour argent comptant le scandaleux dénigrement de ce charmant et délicieux animal. Bien sûr, bien sûr, celui-ci dans son intérêt personnel, s’il en avait conscience préférerait sans doute être dénigré par l’ensemble de l’humanité afin d’éviter de finir en saucisson.
Mais comme aucune Rosette de Lyon n’a jamais raconté à un cochon vivant comment elle avait été transformée en saucisson par une méchante fée, par les forces du mal, par le péché contre les prophètes, le manque d’assiduité à l’office, etc., le cochon, innocemment athée, car il n’a jamais eu l’occasion de pratiquer la métaphysique, l’ésotérisme, la sorcellerie et l’alchimie réunis, continue sa petite vie tranquille sans se douter de rien.

Il ne connait pas son bonheur.

J’attends donc avec une certaine curiosité, voire des frémissements avant-coureurs de délectation, les commentaires des imams, des rabbins, ne parlons pas des vegans à propos de cette greffe d’un cœur de cochon à un humain. Certes, un Américain, mais faut pas généraliser, il y en a des biens, si, si, et il est possible que ce patient en fasse partie. Mais peut-être a-t-il voté Trump et le referait au cas où. Voilà une question carrément ontologique.
Quant à ceux qui trouveront à redire à cette avancée chirurgicale, on les laissera se démerder avec leur vieille guenille cardiaque, (comme on devrait faire avec les non-vaccinés du Covid, heureusement pour eux les médecins ont le sens civique). Après de longues souffrances, ce qui toujours comble d’aise leur dieu, ils arriveront en l’état en enfer ou au paradis, car telle est la loterie des croyants une fois morts. Les autres ne s’aperçoivent de rien.
Cet évènement médical marquera tout de même une étape dans l’histoire de la charcuterie. Outre sa notoriété en matière de côtes, de jambons, de pieds, de boudin, de pâté, de saucisse et j’en passe, voici le cochon en ami de cœur. C’est émouvant.
Vous me direz, pourquoi pas un cœur de chimpanzé, de gorille, d’orang-outang, etc. dont d’après Darwin l’homme descend, marmonnant, pas fier « Ben quoi ! tout le monde peut se tromper ! », tel le vers luisant descendant d’un mégot, vous le saviez déjà. Encore que selon moi, l’homme en serait plutôt tombé du singe. Et probablement sur la tête, parce qu’on est la seule espèce qui ait pu produire encore de nos jours un Donald Trump ou un Eric Zemmour. Quoi qu’on ait connu bien pire, et qu’on ait pas encore tout vu.
Mais enfin, le singe, on est un peu de la famille, ce qui devrait à priori faciliter la compatibilité.
Vous allez me dire que je fais un peu dans le supracrépidarianisme (parler avec autorité de choses auxquelles on ne connait rien. Jean Rebuffat vous a éclairés sur ce mot nouveau la semaine dernière). Faut-il voir dans cette préférence pour le cochon le fait que le singe ne fait pas partie de notre art culinaire ? C’est compréhensible, sinon, on aurait l’impression d’être un peu anthropophage en plus de diverses turpitudes avec lesquelles notre espèce vit sans trop de remord depuis longtemps, mais là… Bouffer un cousin ! Pas de ça chez nous !
En fait, je m’inquiète. J’espère qu’après lui avoir prélevé le cœur, on le découpe, le cuisine et on le bouffe le cochon. Jeter toute cette bonne viande juste pour garder un seul morceau serait du pur gaspillage !
Le gaspillage, c’est mal.
Oui, bon, on lui a fait subir un traitement spécial à l’animal, afin qu’il ait un cœur compatible avec l’homme. C’est un OGM.
Les OGM, c’est mal.
Mais si on y regarde de plus près, le traitement qu’on fait subir aux cochons dans l’industrie de l’élevage et les saloperies dont on les gave avant de les bouffer nous-mêmes, c’est pas mal non plus.
Peut-être même que ces saloperies contribuent à nous bousiller le cœur. Tout est dans tout.
Heureusement il y a désormais les cochons pour nous sauver.
On est bien peu de choses.
Que le monstre en spaghetti volant vous touche de son appendice nouilleux.
Ramen.

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