Faits divers

Toutes choses étant égales, c'est un événement minuscule qui a fait les unes cette semaine: la blessure par balle du chanteur Kendji Girac, tard la nuit, dans un emplacement réservé aux gens du voyage non loin de Biscarosse. Tout était réuni pour en faire ce qu'on appelle en jargon journalistique un beau fait divers. Un homme jeune et célèbre, l'archétype du gitan, vainqueur d'un crochet célèbre, qui se serait blessé en mimant un suicide suivant une scène de ménage. Alcool, revolver et cocaïne... Exotisme, pages people et clichés.

Pourquoi tant d'intérêt, cependant? Il n'est pas mort - 27 ans, pourtant, un âge idéal pour entretenir la légende, quand on est chanteur -, il a disculpé tout de suite son entourage et l'affaire semble close, derrière l'apparente omerta pas la moindre histoire de cul. Or aussitôt les journaux ont marché. Bien sûr, ils anticipent l'intérêt supposé du public et le mystère apparent du départ laissait présager un feuilleton toujours potentiellement vendeur (papier, audimat ou clic). Mais ce qu'il y a de plus extraordinaire dans cette série avortée, c'est le rapport justice-presse. Le porte-parole du parquet de Montauban a mis une heure un quart à détailler tout ce qu'il savait sur ce coup de feu, sa victime et son auteur, au grand dam, disent les vertueux, des totems que sont la présomption d'innocence ou le secret de l'instruction.

Mais ce que ces collègues vertueux ne soulignent pas, c'est qu'ils ont eux-mêmes contribué, et pas qu'un peu, à surdimensionner la chose... notamment en relatant derrière une mine offusquée de façon exhaustive le contenu des cinq quarts d'heure de célébrité du procureur.