Mort d'un précurseur du XXIème siècle

Il est difficile de définir le mot populisme et les exemples de politiques populistes foisonnent. Il y a tout de même une caractéristique commune entre certains populistes: leur obstination à rester au pouvoir pour éviter tant que faire se peut les problèmes judiciaires. Et à ce titre, feu Silvio Berlusconi en a constitué l’un des exemples les plus frappants et les plus constants. On peut sourire de ses rodomontades et de ses frasques mais il a certainement ouvert certaines portes dans lesquelles d’autres qui lui ressemblent se sont engouffrés. Donald Trump, par exemple, qui finira bien par mourir comme tout le monde et comme son infréquentable modèle italien, aux funérailles duquel on ne trouva pas grand monde en fait de beau linge, sauf Viktor Orban. Qui se ressemble s’assemble…

Silvio Berlusconi a dû être regretté par un autre spécialiste du genre, Benyamin Netanyahou. Et par des foules entières qui s’identifient à ces héros dont les erreurs mêmes parlent pour eux: s’ils dénoncent l’incurie des élites politiques, c’est qu’ils n’en sont pas, et la preuve, c’est qu’ils sont persécutés par une justice aux ordres, comme chacun sait et comme Trump le claironne. Ce paradoxe est un danger constant pour la démocratie. Qui crie «tous pourris» accepte aisément d’être dirigé par quelqu’un qui se moque bien des hommes et des lois… Car comme disait Proust, les faits n’entrent pas dans le monde de nos croyances, ils s’y soumettent plus qu’ils ne les façonnent. Il parlait de médecine mais la phrase vaut pour bien des domaines et le déclin apparent des religions n’a rien changé à l’affaire. Croire est plus puissant que penser, puisque croire dispense de penser et balaie le doute quant au bien-fondé de ses convictions, tandis que penser débouche sur le doute et indirectement, sur la tolérance.

Adieu qui n’existe pas, Silvio. Et sans le moindre regret de ma part.