L’Etat de Palestine a droit à la justice internationale

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Par | Journaliste |
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Stéphane Hessel, président du Tribunal Russell sur la Palestine, ici lors de la session tenue à Londres le 20 novembre 2010. Photo © TRP

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Cela faisait quelques années que de nombreux militants pour le respect du droit international, des Conventions de Genève et du droit des peuples à l’autodétermination l’attendaient : enfin la Cour Pénale internationale a "décidé à la majorité que la juridiction territoriale de la Cour pour la situation en Palestine (qui en est membre depuis 2015, ndlr) s'étendait aux territoires occupés par Israël depuis 1967, à savoir Gaza et la Cisjordanie, y compris Jérusalem-Est.", selon un communiqué envoyé le 5 février 2021. Ce qui signifie l’ouverture possible d’une enquête pour crimes de guerre commis par l’occupant israélien

Or, déjà le 20 décembre 2019, le Procureur avait annoncé la conclusion de l'examen préliminaire de la situation en Palestine en concluant que « tous les critères définis dans le Statut de Rome pour l'ouverture d'une enquête étaient remplis ».

Parceque la Palestine a adhéré au Statut de Rome qui instaure la CPI, elle « a le droit d'être traitée comme tout autre État partie pour les questions liées à la mise en œuvre du Statut. », déclare la CPI. Une adhésion qu’Israël et les Etats-Unis se gardent bien de signer car ils ne reconnaissent pas la compétence d’une instance de droit international sur leurs agissements estimés criminels à l’encontre d’autres Etats et populations.  Ces deux pays n’ont jamais reconnu le droit des Palestiniens à disposer d’un Etat selon les résolutions nombreuses de l’Assemblée générale des Nations Unies et notamment la résolution 67/19  qui « [a réaffirmé] le droit du peuple palestinien à l’autodétermination et à l’indépendance dans un État de Palestine situé sur le territoire palestinien occupé depuis 1967 ».

"Le tribunal a une nouvelle fois prouvé qu'il est un organe politique et pas une institution judiciaire", a déclaré le Premier ministre Benjamin Netanyahu dans un communiqué. Selon lui, la CPI entrave le "droit des démocraties à se défendre contre le terrorisme". Oubliant de rappeler qu’en tant que puissance occupante, Israël est tenu par les Conventions de Genève, qu’il ne respecte pas. Au contraire, les gouvernements israéliens se sont rendus coupables de crimes de guerre, notamment, en bombardant une population civile emprisonnée dans les frontières de Gaza, causant des milliers de morts. La notion de terrorisme est proclamée par ces gouvernements israéliens de manière à effacer le concept de résistance d’un peuple à une occupation criminelle. Les gouvernements israéliens sont aussi accusés de « terrorisme d’Etat »  y compris pour la pratique des assassinats politiques à savoir les « éliminations ciblées » de dirigeants palestiniens, ordonnées par Ariel Sharon à partir de 2001 et jugées contraires au droit international par la communauté internationale.  

Les Etats-Unis se sont dits de leur côté "sérieusement préoccupés par les tentatives de la CPI d'exercer une juridiction sur les militaires israéliens".

"Nous avons toujours adopté la position selon laquelle la juridiction de la cour devrait être réservée aux pays qui l'acceptent ou qui y sont renvoyés par le Conseil de sécurité de l'ONU", a dit à la presse le porte-parole du département d'Etat américain, Ned Price. En effet, c’est la meilleure méthode pour échapper à toute condamnation pour des actes criminels commis par les Etats-Unis dans le monde, sachant que le Conseil de sécurité est bloqué sans cesse par les superpuissances et que, dans le cas de la Palestine, les Etats-Unis ont toujours opposé leur véto à toute décision concernant l’occupation israélienne de la Palestine. Le président Trump a été plus loin encore : en septembre il avait décidé des sanctions contre la procureure de la CPI, Mme Bensouda ; celle-ci a demandé à Joe Biden de les lever.

L'ONG de défense des droits de l'homme Human Rights Watch estime quant à elle qu'il est "grand temps que les auteurs israéliens et palestiniens des plus graves violations" des droits rendent des comptes devant la justice.

Deux conclusions s’imposent : la Palestine est bien un Etat, et bénéficie donc des droits de tous les Etats reconnus dans le monde, et surtout, la CPI va pouvoir examiner toutes les violations des droits commise en Palestine par l’occupant israélien et par des combattants palestiniens, le Hamas est particulièrement visé, même s’ils ont été perpétrés avant l’instauration de la Cour Pénale Internationale. 

La décision de la chambre préliminaire de la CPI est "une victoire pour le droit, la justice, la liberté et les valeurs morales dans le monde", écrit le ministre palestinien pour les Affaires civiles, Hussein al-Sheikh.

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On verra si la CPI ira au bout de la démarche judiciaire pour qu’enfin le droit international soit respecté. A cet égard, les travaux réalisés par le Tribunal Russell sur la Palestine (2010 – 2014) constituent une base juridique importante, utile et novatrice car on y détaille la notion d’apartheid comme crime commis par Israël à l’égard des Palestiniens. Dans sa résolution finale, le TRP appelait l’’Assemblée générale de l’ONU à réinstaurer le Comité spécial contre l’apartheid de l’ONU afin qu’il examine la question de l’apartheid à l’encontre du peuple palestinien. Et pour ce faire, « le Comité devrait dresser une liste des individus, des organisations, des banques, des sociétés, des entreprises, des organisations caritatives et des organes publics ou privés qui assistent Israël dans son régime d’apartheid en vue de prendre des mesures appropriées. », demandait le TRP.

En attendant que la justice soit dite, des milliers d’associations et de personnes dans le monde manifestent leur attachement aux droits des Palestiniens par le biais de la campagne BDS (boycott, désinvestissement, sanction), sur le modèle des campagnes qui ont abouti à la fin de l’apartheid en Afrique du Sud. Preuve s’il en faut que le droit international reste la référence des revendications pour un monde plus juste.   

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