La Grèce au bout de la rue

À table avec l'Ogre

Par | Journaliste |
le

Comment ne pas avoir envie de goûter? C'est bel et bon. Photos © J. Rebuffat

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Lecture 5 min.

À dire vrai, quand on parle de cuisine grecque, j'ai toujours peur pour mes assiettes et pour mon estomac. Mais une longue excursion, voici deux ans, à Athènes et dans les Cyclades, m'avait convaincu qu'il y avait autre chose que les petits os à grignoter. Un coup de nostalgie et hop ! je me suis mis à la recherche d'un bon restaurant grec à Bruxelles (j'ai trouvé, près de mon domicile bruxellois) et sur la lancée j'ai fait de la moussaka pour des amis bretons (les Bretons sont de grands voyageurs curieux de tout). Le nom du restaurant ? Vous ne voulez pas la recette d'abord ? Non ? Bon, c'est Koyzina Authentica. Mais avant d'y aller, passez par ma cuisine, je vous prie.

Ah, la moussaka... Je déteste. Déjà que je n'aime pas trop les aubergines, alors cet avatar de hachis Parmentier sur la purée duquel on a étalé une béchamel et du fromage fade, et qui vous fait prendre un kilo rien qu'au coup d’œil...

Mais il en va de la moussaka comme du reste : il y a autant de recettes que de cuisinier.e.s (avec le langage inclusif, comment met-on l'accent?) et en vérité, c'est un plat de fête, long à préparer, autant vous prévenir. Je me suis inspiré d'une recette venue de Corfou mais interprétée à ma façon, c'est-à-dire en bannissant la béchamel. (La béchamel fait surgir en moi des relents anticléricaux primaires.) Figurez-vous qu'à Corfou, on n'utilise pas que des aubergines, mais aussi des courgettes, et les courgettes, j'aime. Prenez donc une aubergine (bien dodue, j'en trouve au marché, elles coûtent plus cher parce qu'elles sont à l'ancienne, c'est-à-dire avec une peau moins sombre, voire zébrée de blanc). Tranchez-là finement et faites revenir dans de l'huile d'olive sans les superposer : cela prend du temps, vous disais-je. Mettez à éponger sur du papier absorbant. Faites subir le même traitement aux courgettes (tranchées en longueur et peu épaisses). Faites revenir un hachis d'agneau, de porc et de veau avec un oignon (de Roscoff, en ce cas, honneur à la Bretagne) et de l'ail puis dès que c'est suffisamment doré, ajoutez quelques quartiers de tomate et laissez mijoter longtemps. Épluchez et tranchez des pommes de terre assez fermes (un peu comme pour un gratin dauphinois). Faites blanchir cinq minutes dans de l'eau salée puis égouttez. Dans un plat à enfourner, en commençant par les aubergines, vous disposez les légumes et le hachis en couches successives. Par dessus, vous placez les pommes de terre, vous ajoutez de l'ail que vous pressez par dessus sans mesquinerie, vous versez 20 à 25 centilitres de crème et enfin, vous saupoudrez largement d'un fromage au goût prononcé (j'ai pris du pecorino, on ne dira jamais assez combien Rome doit à la Grèce, elle peut bien en rendre un peu).

Au moment de mettre au four, cela ressemble à ça :

et vous cuisez à disons 160 degrés un bon moment (une bonne heure ou deux, ça dépend de l'épaisseur du plat et de la quantité, là c'était deux bonnes heures, mais j'ai gratiné en deux fois). Vous vous assurez du moelleux de la préparation, vous passez sous la salamandre le temps que ça dore et vous vous régalez.

Mais... assez parlé. Dirigeons-nous dans le bas de l'avenue Brugmann (enfin, là, je parle pour moi) et patientons en attendant l'arrivée d'une Ogreline en dialoguant avec de l'ouzo, autant faire couleur locale, sans compter qu'à part deux colonnes qui étaient là depuis la construction de ce bel hôtel de maître bien bourgeois, il n'y a rien qui fasse grec façon carte postale. La vaisselle qui patiente sur la table n'est pas celle qu'on aurait envie de jeter à travers les lieux (et quand les assiettes seront remplies, on aura envie de les vider, vous allez voir). La clientèle afflue d'un coup vers les 20h15 et ma convive, elle aussi, débarque. Tout comme les entrées, à dominante légumière, avec notamment une purée de pois accompagnée de poisson fumé. Chez Sonia Dimitriadou, l'esprit des lieux, n'espérez pas du tarama rose fluo... Son but, en arrivant à Bruxelles pour y suivre son mari nommé dans la capitale européenne, était de recréer, dans une ambiance cosy, la cuisine de sa maman, des plats grecs traditionnels... mais sortant rarement des frontières nationales. La carte est courte et est complétée par des suggestions. Donc il y a par exemple de la moussaka ou de l'agneau (cuisson longue et lente), mais pas n'importe lequel et pas n'importe comment :

Le chef Thanos Gotras-Koutras – présent depuis l'ouverture du restaurant –

est aux fourneaux avec un commis et un dresseur. Regardez par exemple le dessert

que rassasiés, nous avons demandé unique avec deux cuillers : il fut donc double.

Tout cela pour des prix très raisonnables : bien des vins sous les 25€, les entrées vers la douzaine et les plats, entre 15 et 25. Je ne vous parle même pas du lunch à 18€ et j'oublie de vous dire qu'on peut emporter les plats ou les ingrédients qui les composent.

Bref : incontestablement, cette « cuisine authentique » figure parmi le trio de tête de ce qui se fait de mieux en grec à Bruxelles. Sans compter l'accueil charmant des patrons.

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Koyzina Authentica, avenue Brugmann 519 à 1180 Uccle. Fermé dimanche et lundi.

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