Fémininement correct

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Dernière trouvaille des amies de la diversité, découverte dans Le Canard Enchainé du17/03/21 — on me dit qu’il en a été question ailleurs aussi. (ce qui prouve tout de même que je ne lis pas que La libre Belgique et Entre les lignes).

Le texte d’Amanda Gorman, déclamé lors de la cérémonie d’investiture de Jo Biden doit être publié par Meulenhoff, honorable maison d’édition néerlandaise, mais ne sera pas traduit par l’écrivaine Marieke Lucas Rijneveld.

D’après l’avis, suivi par l’éditeur, fermement exprimé par une journaliste militante féministe et féminine (ou peut-être sexuellement plus compliquée, mais rien n’est précisé, ce qui me laisse dans l’inquiétude de commettre un acte d’inqualifiable ségrégation machiste), seule conviendrait pour traduire ce texte, une femme noire elle-même slameuse.

Et, je suppose, connaissant parfaitement les subtilités de l’américain populaire, puis capable de les restituer dans le même registre en néerlandais. Déjà que traducteur c’est pas facile…

Ce sera finalement une « équipe » qui se chargera du boulot. On ne sait pas si l’équipe sera composée uniquement de femmes diversement féminines et connaissant parfaitement l’américain et le néerlandais. Ce qu’on peut tout de même pressentir c’est que la traduction sera le fruit des compromis entre les opinions des intervenantes, qui, c’est humain, (pardon, humaine) ne seront pas nécessairement d’accord entre elles. Ne doutons pas que cette façon de procéder sera la manière la plus authentique de faire vivre le texte d’Amanda Gorman ! Ce pourra être un bel exercice de langue de bois du Polit-bureau des Traductrices du Peuple Féminin.

Dans le même genre et le même article, un autre éditeur a aussi viré, par la seule force de la publication d’un article de presse féministe, le traducteur pressenti de la même œuvre, en Catalan. Un mec qui traduirait le texte d’une femme ! mais où va-t-on ? Il sera, lui aussi remplacé par une « équipe ».

Le Canard suggère, à juste titre, j’ajoute que ça devrait même être la règle, d’inclure des analphabètes (aux féminités multiples) dans l’équipe afin que la diversité soit respectée.

C’est ainsi que j’en viens à me demander, comme mâle blanc, honteusement hétérosexuel, donc dépourvu de toute sensibilité, si j’ai réellement bien pu comprendre « Le deuxième sexe » de Simone de Beauvoir.

N’étant pas noir ai-je pu bien capter le sens des poèmes d’Aimé Césaire ? Celui des livres de Léopold Cedar Senghor ? Patrice Lumumba ? Hum ! Il n’a pas eu le temps de beaucoup écrire, mais j’ai dû passer à côté de quelque chose. Ne parlons pas de Jimmy Hendrickx dont je ne pourrais jamais comprendre à quel point il était un grand guitariste.

Inversement, si l’on suit cette logique de nouveau racisme qui n’ose pas dire son nom (et puis racisme, c’est masculin, c’est pour ça que c’est très vilain), on pourrait conclure qu’évidemment des personnes noires de peau ne peuvent rien comprendre à la première Déclaration des droits de l’homme, 1789. (L’homme ! Quelle horreur ! Rien que ce mot la décrédibilise !) Et Voltaire ? Rousseau ? Et Marx ? Rien que des blancs! Il faut refaire le film, réécrire l’histoire, non pas pour ce qu’elle fut, mais pour faire plaisir aux minorités opprimées. Nous sommes incapables de comprendre qu’à une époque donnée les mœurs, le langage étaient différents des nôtres et que, bien entendu, depuis ces lointaines époques, rien n’a évolué).

 

Pour rester proche du sujet, dans ma « Libre » préférée, j’ai eu l’occasion de lire un débat concernant l’écriture inclusive, opposant une professeure, professeuse, profesrice (allez savoir ?) à l’ULB dans je ne sais plus quel domaine concernant la langue française, et le rédacteur en chef du Figaro.

A ma grande honte (mais c’est vite passé), j’ai trouvé plus pertinents les arguments du Figariste, disant en substance que l’écriture inclusive était une fabrication idéologique. Vous rendez-vous compte ? Trouver pertinents les arguments d’un type de droite ? Comme si au temps du Parti communiste j’avais accordé foi à un type disant que le goulag, ce n’était pas que de la propagande occidentale !

Perso, à idéologique, j’aurais ajouté bureaucratique. Car l’écriture inclusive, selon moi n’a pu jaillir que dans le cerveau de quelque bureaucrate (bureaucrate, ça se lit dans les deux genres, hein !) en mal de complications inutiles, mais prouvant sa capacité de nuisance. N’est-ce pas l’idéal de la bureaucratie ?

Cette dame m’a tout de même bien amusé avec ses arguments. Notamment celui-ci : (je résume) lorsque la police intervient on parle d’un rassemblement de policiers. On voit donc des hommes.

Cette dame ne doit pas sortir souvent. Si elle n’a pas vu, aussi bien dans la réalité qu’à la télé, que lorsqu’il y a un rassemblement policier (. ère ?) des femmes en font partie. Si, si ! C’est dans la vraie vie. Elle devrait essayer.

Certes, « La Police », c’est féminin, mais insuffisant bien sûr (malgré les hommes qui en font partie ?) Si notre éminente professeure ne veut pas entendre parler d’un rassemblement de policiers, elle devrait savoir qu’on peut dire un rassemblement de flicaille. On pourrait écrire « flicouille » pour marquer le masculin avec du féminin — pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ? — et écrire en français inclusif : « un rassemblement de flicaille (s). couille (s) ». Ce serait au moins amusant.

Mon Dieu quelle horreur ! Quelle vulgarité ! Pas de ça chez moi ! On voudrait nous faire remplacer nos beaux termes estampillés « Académie française » par des vocables d’une racaille insensible à la beauté de notre langue. Langue protégée depuis le cardinal de Richelieu et ses successeurs des insanités du sabir des basses classes, destinée à l’aristocratie, puis aux républicains propres sur eux, aux élites en un mot.

Voilà sans doute une des raisons pour lesquelles le français n’est pas encore une langue morte, mais devra bientôt être classée parmi les espèces protégées.

Perso, je table plus sur l’imaginaire populaire que sur de doctes diplômés pour trouver des solutions à ce problème, certes légitime, d’inclusion des femmes dans le vocabulaire courant.

Note d’espoir : J’ai quelques fois entendu des jeunes filles parler d’une copine qui « avait des couilles », pas froid aux yeux, quoi ! Agées d’une vingtaine d’années, connaissant l’anatomie, ayant reçu une éducation sexuelle normale, sachant pertinemment que les filles n’ont pas de couilles. Et pourtant si ! De plus, ça ne vexait absolument pas leurs petits amis qui eux aussi savaient que les filles n’ont pas de couilles, ce qui ne les empêche pas d’en avoir !

Mais tout cela est d’un trivial! Vite, tirons les rideaux de nos confortables tours d’ivoire afin de nous épargner la vue des jeux de la populace.

Pour ce qui me concerne, s’il y a une urgence pour les femmes c’est « A travail égal, salaire égal », on peut ajouter « que l’on soit femme, homme, blanc, noir, métis, immigré, sans papier, né natif ou tout ce qu’on voudra ». Ce n’est pas une billevesée bureaucratique de bobo (bobo.bo.e, bobote?) vigoureusement engagé dans des combats utiles seulement à la conversation ou à vendre des livres.

Chacun ses guerres.

Que le monstre en spaghetti volant vous touche de son appendice nouilleux.

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Merci !

Ramen.

 

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