École contre fast-foods

L’avenir de l’école

Par | Penseur libre |
le

Photo © Laurent Berger

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Si je devais ne retenir qu'une image, celle qui me parle le plus, c'est celle d'une femme courageuse, qui en France, s'avance vers un groupe de jeunes émeutiers pour leur parler. Nous la voyons vouloir dialoguer avec eux, elle leur crie de ne pas toucher à l'école du quartier. Alors que le feu grandit, elle longe les murs de l'établissement, elle les apostrophe. Des bijouteries pillées, des fast-foods détruits mais s'en prendre à l'école qui est déjà atteinte par le système, je m'interroge. L'école prise pour cible!

Chez nous, en plein centre ville, à Bruxelles, nous pouvons admirer un long boulevard décoré par une belle série de fast-foods et de centres commerciaux. Les politiciens semblent se féliciter du grand capital tandis qu'ils laissent toute une jeunesse dans le désoeuvrement. La droite récupère les valeurs de la République tout comme celles de la laïcité. La République, c'est la Commune de Paris, la Révolution française. Les valeurs de la République sont celles de l'éducation, de la fraternité, de l'égalité, pas celles de la démonstration du pouvoir autoritaire et arbitraire! Il semblerait qu'en France, un automobiliste par mois est tué par la police.

L'universalisme, ce n'est pas celui d'une transcendance blanche qui regarderait l'autre avec arrogance. L'universel, c'est l'immanence de l'humanité. L'école, du moins celle que je défends, est celle de cet universel humaniste, celle de la mixité, de la diversité, du vivre ensemble. Si le discours de la laïcité est en crise, il faut donc inventer une autre narration qui retrouve son sens premier, celui de gauche. La République, ce n'est pas la représsion mais l'émancipation de tous. 

Il n'existe pas de violence qui soit gratuite, si nous ne cherchons pas à la comprendre, sans la justifier, elle se reproduira, la violence est une réponse à la violence, envoyer des blindés dans les rues, voir les manifestants perdre un oeil, voir la police devenir équipée comme des soldats, cela doit nous inquiéter. Si un État ne répond que par la force brutale, il perd sa vocation démocratique. Si une jeunesse n'a plus qu'une forme d'avenir qui est celle du travail et des loisirs, de la consommation et du cimetière, alors l'élitisme pour tous est mort! 

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S'il devient naturel pour un policier de tirer sur un jeune homme de 17 ans alors que la voiture aurait pu aussi foncer après son tire sur un passant alors nous sommes confrontés à la goutte d'eau qui fait déborder le vase. Observer un syndicat de la police menacer d'entrer en résistance contre les émeutiers est tout aussi inquiétant. Alors informons-nous encore une fois du salaire des enseignants, de l'état des bâtiments scolaires, du manque d'éducateurs, d'adultes présents ouverts au dialogue. Prenons conscience de l'appauvrissement des classes moyennes par une inflation continue, des fins de mois de plus en plus difficiles pour des gens qui ont parfois deux boulots. Alors que Monsieur le Président défend le travail, ce dernier n'est plus source de sécurité pour répondre aux premiers besoins! Alors, la violence ne m'étonne pas, je la vois, parce que les autorités se refusent à la pédagogie et à la prévention, délaissent la culture, ne parviennent plus à réenchanter le monde, donnent une vision étroite de l'avenir. Pourquoi dés lors s'étonner des replis identitaires qui n'existent pas seulement chez les musulmans?

En cette fin d'année scolaire, je vois mes rhétoriciennes, Sophia, Inès, Lisa, Lucia terminer leur humanité comme on disait à l'époque, la larme à l'oeil, elles trouveront leur chemin, je l'espère. Nos hommes politiques feraient bien parfois de suivre des cours de pédagogie plutôt que de management! Je sais qu'il faut parfois venir à la sanction, mais je l'observe toujours comme un échec. Tout va si vite aujourd'hui dans une société liquide et numérisée, que le dialogue devient rare. L'espace social déconstruit, les liens entre les générations perdus, la transmission abandonnée, l'omniprésence du divertissement  qui ne laisse plus d'ouverture pour la réflexion, la pensée. Le manque de formation de la police en est un bon exemple. Depuis quelques années, la police française n'est plus gardienne de la paix, elle ne joue plus son rôle de proximité avec la population, elle est remplacée par des agents privés, elle est limitée à son rôle répressif alors qu'elle semble impuissante contre les trafiquants de drogues. Des dealers encerlent des écoles, et parfois ils se poursuivent avec des armes à feu dans les cours de récréation. Lors des émeutes, on peut voir des milices d'extrême droite vouloir faire la guerre aux jeunes délinquants. Le tribalisme remplace ce qui construit la société. L'école devient donc un dernier espace du vivre ensemble menacé. 

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