1er Mai, Marx et Varoufakis

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Une affiche de 1929 appelant à la manifestation du 1er Mai. © Coll. IEV

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Il y a 200 ans, naissait Karl Marx, le 5 mai 1818 à Trèves, en Rhénanie prussienne. Sa trajectoire  d’étudiant, de journaliste sonne très moderne en cette période de commémoration de « mai 68 », de révolte étudiante. Sa pensée résonne dans le militantisme mondialisé contre le capitalisme destructeur.

 Lors de ses études de droit à Berlin, Karl Marx rencontre de jeunes philosophes se réclamant de Friedrich Hegel. Ils évoluent « vers l’athéisme et la revendication d’un régime démocratique », écrit Gérard Vindt dans « Alternative économique » (1). Chassé de l’université par l’empereur Frédéric-Guillaume IV « il se replie alors sur une activité de publiciste et de journaliste » ! Autant dire que la fortune ne lui sourira que rarement, ce qui reste encore le cas aujourd’hui pour nombre de journalistes non conformistes !

« Le XIXe siècle est celui de la presse et du combat pour sa liberté. C’est principalement à travers elle que les opinions s’expriment. Marx défend les siennes dans la Rheinische Zeitung (La Gazette rhénane), dont il prend la direction rédactionnelle quelques mois fin 1842 et début 1843. », écrit Gérard Vindt.  « Son lectorat culmine alors à 3 300 abonnés, ce qui est considéré comme un succès. Edité à Cologne, le journal suit, avec Marx, une ligne libérale, favorable au libre-échange et aux libertés démocratiques. Ces idées et la qualité des articles lui valent le soutien, y compris financier, d’une partie de la bourgeoisie rhénane. Mais pas du pouvoir prussien, qui finit par interdire la publication. »

Libéral, donc, le jeune Marx !

En 1848, il vit une sorte de « printemps des peuples »  amorcé par la révolution parisienne de février et qui gagne la Rhénanie prussienne. A Cologne, Marx  réunit des fonds collectés auprès de petits patrons et de démocrates exerçant des professions libérales. Il lance la Nouvelle gazette rhénane, antiprussienne et milite pour une « République allemande une et indivisible ». On n’y trouve pas de discours communiste sur le thème de la lutte des classes.

Par contre, le philosophe Karl Marx développe, à côté de son action journalistique et politique, le concept de lutte des classes (entre exploitants et exploités) comme moteur de l'histoire. Ce « matérialisme dialectique se caractérise par le primat de l'histoire (tout évolue), le progrès venant de contradictions résolues, l'action réciproque des choses les unes sur les autres, le progrès par bonds, par crises brusques et soudaines (révolutions). Le prolétariat doit s'organiser à l'échelle internationale afin de s'emparer du pouvoir et, après une période de transition (dictature du prolétariat), conduire à l'abolition des classes et la disparition de l'Etat (communisme). Karl Marx prédit la fin de la société actuelle où le capitalisme se détruira lui-même, permettant ainsi l'avènement d'un état ouvrier. »

« Passant de la théorie à la pratique, Karl Marx crée avec Friedrich Engels la Ligue des communistes en 1847 et rédige avec lui le "Manifeste du parti communiste". », résume l’auteur du site décapant les idées toutes faites, Toupie.org. (2)

La  « Nouvelle Gazette Rhénane » connaît un beau succès de vente : jusqu’à 6.000 exemplaires vendus. Mais la répression prussienne est terrible et, en mai 1849, Marx quitte le territoire avec sa famille et son ami Friedrich Engels. Le « dernier numéro de la revue paraît le 19 mai, imprimé tout en rouge. Il sera vendu à 20 000 exemplaires. », précise Gérard Vindt.

A Londres, il vit de sa plume en étant correspondant du journal américain New-York Daily Tribune. « Cette activité est considérable : 487 longs articles d’analyse sur la révolution de 1848 en Allemagne, sur la guerre de Crimée, les guerres de l’opium, la révolte des cipayes ou la crise économique de 1857, dont certains écrits par Engels (mais signés Marx). », détaille Gérard Vindt. Cependant, lorsque le journal newyorkais sombre suite à la guerre de sécession, Marx et sa famille vivent dans une grande précarité et son engagement accru dans le communisme n’aide pas à trouver des revenus. Il subsiste misérablement grâce à quelques héritages et à la générosité d’Engels.

Mais sa pensée se développe sans cesse et la théorie du communisme marquera durablement le XXème siècle, y compris, tragiquement, lors du dévoiement de cette pensée par le communisme totalitaire et dictatorial de Staline et de Mao.

Le capitalisme se brûle lui-même

Cette pensée inspirante est remise dans l’actualité grâce à Yanis Varoufakis, co-fondateur de DIEM25 (Mouvement pour la Démocratie en Europe 2025) et ancien ministre des Finances en Grèce. Pour lui, la solution est simple : impossible de battre le capitalisme mais bien de l’amener à se brûler lui-même, le pousser, comme le préconisait Marx, jusqu’à ses limites tout en limitant ses effets néfastes et en préparant sa socialisation. (3)  

Il dit, dans le Guardian: « When asked by journalists who or what is the greatest threat to capitalism today, I defy their expectations by answering: capital! Of course, this is an idea I have been plagiarising for decades from the manifesto. Given that it is neither possible nor desirable to annul capitalism’s “energy”, the trick is to help speed up capital’s development (so that it burns up like a meteor rushing through the atmosphere) while, on the other hand, resisting (through rational, collective action) its tendency to steamroller our human spirit. In short, the manifesto’s recommendation is that we push capital to its limits while limiting its consequences and preparing for its socialisation.

We need more robots, better solar panels, instant communication and sophisticated green transport networks. But equally, we need to organise politically to defend the weak, empower the many and prepare the ground for reversing the absurdities of capitalism. In practical terms, this means treating the idea that there is no alternative with the contempt it deserves while rejecting all calls for a “return” to a less modernised existence. There was nothing ethical about life under earlier forms of capitalism. TV shows that massively invest in calculated nostalgia, such as Downton Abbey, should make us glad to live when we do. At the same time, they might also encourage us to floor the accelerator of change.”

La pensée de Marx était visionnaire si l’on en juge par les catastrophes financières qui ponctuent notre époque de capitalisme mondialisé et qui accroît partout les inégalités. Et si l’on ne doit plus s’exprimer en des termes du XIXème siècle, devenus incompréhensibles pour la population actuelle, la réalité de l’exploitation du travail, l’inéquitable distribution des richesses, l’exploitation mortifère des ressources matérielles ont été prédites par le philosophe. Les solutions découlent de celles préconisées dans le Manifeste du parti communiste d’antan: la dignité humaine par la lutte solidaire des travailleurs, quelle que soit leur sphère d’activité, dans les campagnes, les villes, dans les usines ou à côté des robots.

Une lutte pour la démocratie dans la vie politique, à tous les niveaux.

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C’est ce que nous rappelle chaque année la Fête des travailleurs, le 1er mai, jour où les syndicats américains lancent leurs actions de grève pour conquérir la journée de travail de 8 heures. Cela se passait en 1886.Trois ans après le décès de Karl Marx.

 

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