"Soleil Noir", vérité de la Camargue

Chemins de traverse

Par | Journaliste |
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En Camargue, le taureau est un animal sacré. Respecté. Aimé parce que sauvage et libre. Photo © R.Job/G.Henkens

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Roger Job et Gaëlle Henkens ont dû respirer à fond en apprenant qu'au terme du premier jour de la mise en vente de leur livre, "Soleil Noir", tous les exemplaires disponibles à la Fnac de Montpellier avaient été emportés. Depuis quatre ans, ils l'attendaient, ce moment. Celui où leur hommage à la Camargue, aux gardians, aux taureaux et à une culture tenue de la mer, du ciel et des chevaux, viendrait enfin au jour. Ils en auront fait, des voyages, pour comprendre ce coin de terre qu'ils aiment, où ils sont chez eux, désormais. Avant de réaliser les premières images de ce monument de papier,  ils ont pris le temps de connaître leurs personnages. De les apprivoiser, si on osait user de ce mot. Disons plutôt que les deux photojournalistes venus de Belgique ont prouvé aux manadiers et gardians que leur recherche était bien plus qu'un reportage: une étape de leur vie. Je le sais, pour les avoir accompagnés à trois reprises dans ce monde de soleil, de passion, de nature libre, de vagues mouchetées d'écume et de sel, avec le vent qui balaie tout, dans le tourbillon de la mémoire, de l'histoire et d'une poésie vécue, intensément. Passionnément.

Dans cet ouvrage, de grands témoins parlent de leur métier et de la manière dont les photographes belges ont réussi à dire leur vérité. Au-delà de ce qu'eux-mêmes, peut-être, estiment être. Roger et Gaëlle, en multipliant les approches, à force de patience et de persévérance, font voler en éclats les clichés qui masquent le visage de la Camargue. Ils nous entraînent dans un recoin du monde qui se bat pour préserver son âme. A la réflexion, c'est ce qui caractérise le photojournaliste Roger Job depuis toujours, cette quête. Il l'a jalonnée en ouvrages qui ne s'altèrent pas avec les années, dont  "Des Hommes et des Chevaux", sur les débardeurs de l'Ardenne belge, et "Turkanas, les premiers des derniers hommes", ou les pasteurs nomades du Kenya accablés par le réchauffement climatique.

Leur livre est une histoire de rencontres et d'amitié. L'album d'une aventure. A l'entame de ce document, Jean Lafon, grand manadier devant l'Eternel, entame son texte par ces lignes: "Je vous imagine, l'ouvrage en main, découvrant qui nous sommes, manadiers et gardians de Camargue, grâce au "Soleil Noir" de Roger et Gaëlle. Dès notre première rencontre, à la cabane de gardian, j'ai su qu'ils seraient dignes de confiance et je ne suis pas déçu. Durant plus de quatre années, ils se sont immergés d'abord dans notre manade, puis dans celles de confrères, partageant ainsi le côté sombre comme le côté lumineux de notre existence. Leurs images fixent les moments rares et intérieurs des hommes du marais que nous sommes, passionnés de notre univers auréolé de noir et blanc, d'ocre et de lumière. Leur travail fixe sur le papier notre mémoire avant tout orale". Venant de Jean Lafon, ces lignes valent toutes les médailles du monde.

 Frédéric Lescot, président de la Confrérie des gardians, joint son message à celui de son ami Jean, nous confie: "Soleil Noir est un grand voyage. Il me paraît que leurs auteurs sont des passeurs de mémoire. Transmettre notre métier, notre passion et notre mode de vie est un devoir. Avec Katia, ma femme; Sébastien, mon frère; Ludivine, sa compagne; nous nous y attachons depuis des décennies. Estelle et Adrien, les enfants de mon frère, tiendront un jour les rênes de la manade Lescot de Saint-Martin-de-Crau. Quant à mon fils, il a choisi de veiller au mas de sa mère et poursuit la tradition aussi. Quand il est à cheval et que les taureaux se regroupent sous le ciel, je sais qu'il vit en homme libre et c'est un honneur". Impossible de dire mieux que ces gardians  leur rêve et la manière dont ils le vivent, aux trousses des nuages et des taureaux qui cavalent là-bas, entre ciel et mer...


"Soleil Noir", par Roger Job et Gaëlle Henkens, éditions du Chêne, 176 pages, format 245x340 mm. Relié. 

Les gardians, Sainte Sara, et la mer Photo © R.Job/G.Henkens

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Au plus près des taureaux, avec le plus grand respect. Photo © R.Job/G.Henkens

La photo de la couverture tient du miracle. La neige épaisse est rare en Camargue, après le printemps. Même les taureaux devaient se demander si le ciel leur était tombé sur la tête.

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