Que sera le journalisme demain ?

Zooms curieux

Par | Journaliste |
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La couverture du numéro de janvier 2020 de Déontoloj, illustrée par le cartoonist Cost.

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On ne se connaît pas assez, vous chers lecteurs, auditeurs, téléspectateurs et nous, journalistes. Et pourtant nous sommes tous les jours ensemble. Nous communiquons par divers moyens, des plus traditionnels aux plus perfectionnés. On ne se quitte plus depuis que vous utilisez principalement vos smartphones partout et tout le temps. Même sur l’oreiller… Ce que nous ne vous conseillons pas cependant : lire sur écran est très mauvais pour un sommeil serein.

Vous vous promenez sur tous ces nouveaux médias et vous vous emmêlez les neurones avec les nouvelles les plus diverses, les plus contradictoires déversées en vrac, le vrai mêlé au faux, le fabriqué, l’inventé, le manipulé et vous perdez évidemment confiance.

Une profession, des obligations

Nous, nous sommes des journalistes, la plupart professionnels c’est-à-dire détenteurs d’une carte de presse certifiant que nous avons fait du journalisme notre profession principale, que nous en vivons et que nous ne pratiquons aucun autre métier de relation publique, de publicité, de commerce… C’est la loi. Elle est en général respectée même s’il y a toujours, comme dans n’importe quelle profession, des menteurs et des fraudeurs. Pour ces cas, la profession dispose de quelques moyens d’action. D’abord, nos patrons peuvent prendre les mesures prévues dans n’importe quelle relation entre employeur et employé et virer les brebis galeuses qui ont manqué à leurs obligations professionnelles. Ils peuvent aussi mettre fin aux contrats qui les lient avec les journalistes indépendants qui seraient fautifs. Cela se passe de la même façon dans la plupart des professions. Et comme ailleurs, la personne ainsi pénalisée peut avoir recours aux tribunaux si elle le souhaite afin de faire valoir ses droits.

Ceux-ci vérifieront si elle a violé une des lois qui encadrent le principe fondamental de la liberté d’expression. Car, sachez-le, on ne peut pas tout dire même si on peut tout penser ; on est libre dans un cadre qui protège la société. Ainsi, il existe des lois réprimant les propos racistes et ceux qui appellent à la violence et au crime. Vous qui vous épanchez sur les réseaux sociaux, attention, les nombreux dérapages d’internautes bas de plafond sont de plus en plus sanctionnés.

Un code et un Conseil de déontologie

Le journalisme a ceci de spécifique qu’il comporte des obligations éthiques : il existe un code de déontologie précis, strict, basé sur des principes reconnus un peu partout dans le monde par les patrons de presse, les éditeurs et les journalistes. Du moins, là où la presse est libre dans des systèmes démocratiques. Car la presse est un pouvoir informel mais puissant : il dépiste les dysfonctionnements du système politique, judiciaire, social et économique lorsque nos dirigeants et représentants veulent les dissimuler ou lorsqu’ils les ignorent. Voyez le retentissement de la divulgation des scandales de fraude fiscale d’ampleur mondiale, documents et noms à l’appui. Une puissance, donc mais qui doit servir le bien public, les intérêts des citoyens et de la démocratie. Et pas la chasse aux scoop, aux scandales, au buzz…

Les journalistes belges francophones viennent de célébrer les dix ans de leur Conseil de déontologie, une instance d’autorégulation devenue performante avec l’expérience. Nous l’avons voulu ouvert à la « société civile » car nous le considérons comme un outil de dialogue avec la société. Les bonnes pratiques journalistiques s’affinent au contact du public, de ses demandes, de ses critiques. Donc, nous sommes 40 membres effectifs et suppléants avec des journalistes, des éditeurs (nos patrons), des rédacteurs en chef et des représentants de la société comme des avocats, des enseignants, des membres d’associations comme la Ligue des droits humains, etc. Depuis dix ans, nous analysons ensemble des plaintes émanant du public mais aussi de journalistes eux-mêmes visant des pratiques qui semblent ne pas correspondre à la déontologie.

Quand une plainte est déclarée fondée, le média diffuseur de ce mauvais travail journalistique est tenu de publier l’avis afin que son public en soit informé. Le Conseil de déontologie publie aussi ces avis sur son site, accessible à tous. C’est ainsi que, au fil des années, nous avons diffusé une meilleure connaissance des obligations déontologiques des journalistes, ranimé le débat avec la société, avec les rédactions, avec les journalistes eux-mêmes qui nous demandent souvent des avis et des conseils. La prévention, il n’y a rien de tel !

Pour célébrer cet anniversaire, nous avons organisé, avec des conseils de presse de divers pays européens, suisse et canadien un Forum européen sur les défis de l’autorégulation à l’ère numérique. Cela s’est passé à Bruxelles les 21 et 22 janvier 2020. On y a longuement parlé de la petite révolution que l’apparition des nouvelles technologies de l’information et de la communication a provoqué dans la pratique journalistique. Plus que jamais, l’exigence de vérification des informations glanées en ligne, de modération des forums de discussion ouverts par des médias doit être renforcée. La traque aux fausses informations est aussi lancée. Il appartient en effet aux rédactions et aux journalistes de redevenir des repères pour un public souvent déboussolé par cette masse de données.

Nous en reparlerons dans notre prochain article consacré, lui, aux 10 ans du Fonds pour le Journalisme.

https://www.lecdj.be/fr/

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Cost. Carpe diem

Et puisque nous illustrons cet article avec un dessin de Cost, je saisis l’occasion pour vous parler de la récente exposition de dessins de cet artiste qui saisit des couleurs fabuleuses pour nous enrober dans des rêves surréalistes, absurdes, parfois frôlant le cauchemar. Mais toujours la poésie nous sauve de la détresse. Un brin d’humour, une once de tendresse, de l’ironie aussi apparaissent dans des tableaux magnifiques, dans des caricatures, dans des couvertures de magazines. Cost nous enchante tout en nous ouvrant les yeux. Voici la couverture du catalogue de cette exposition, édité par La Maison de l’Image, avenue des Volontaires 19, 1160 Bruxelles. www.seedfactory.be.

L'affiche de l'exposition des œuvres de Cost.

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