L’invention de l’écriture

Une édition originale

Par | Penseur libre |
le

© Serge Goldwicht

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Lecture 2 min.

Je ne suis jamais satisfait de mon écriture. Le style est morne et plat comme les voiles d’un bateau qui ne sont jamais gonflées par le vent. Ce que j’écris reste à quai à la grande déception de mes éventuels lecteurs qui ont soif d’aventures, d’émotions, de découvertes et qui avaient probablement préparé leurs bagages mais je ne m’avoue pas vaincu. Je m’accroche et je me bats en changeant de lieu de travail et de méthode. C’est pourquoi j’ai fait l’acquisition d’un flacon d’encre et d’un stylo neuf avec l’espoir que ces nouveaux outils feront émerger le talent qui me manque. Fini l’ordinateur, terminé l’électronique ! Place à la plume.

Le lendemain, je me suis levé tôt enthousiaste à l’idée de travailler avec mes nouveaux outils. La page blanche que j’avais préparé la veille était recouverte d’encre. Mon chat avait plongé ses pattes dans l’encrier et s’était promené sur la feuille. Le plus saisissant c’est qu’il ne s’était pas promené sur la page blanche au hasard mais qu’il avait tracé des lignes de signes, ligne après ligne jusqu’à remplir complètement la feuille. Pas de doute, le chat désirait transmettre des idées au monde et plus particulièrement à moi, son maître. Quelles idées ? Et dans quel style ?Déchiffrer le texte tracé par mon chat devint une obsession. Je me retrouvais l’égal de Champollion devant les hiéroglyphes de la Pierre de Rosette. D’ailleurs mon chat n’était-il pas un lointain descendant de la déesse Bastet ? Déchiffrer, déchiffrer, j’y ai passé des dizaines de jours et des nuits. J’ai même convoqué des spécialistes de l’écriture cunéiforme en plus des égyptologues. Les historiens de l’écriture furent unanimes : le texte était magnifique, intelligent, agréable à lire et très poétique malgré la répétition du mot « croquette », défaut compréhensible d’un chat toujours affamé.

.-Vous lui donnez suffisamment à manger ? m’a demandé un égyptologue suspicieux. Devant tant d’enthousiasme, je n’ai pas dévoilé ma prose car, pas de doute, ce chat était un meilleur écrivain que moi. Je me suis mis immédiatement à le haïr surtout quand il m’observait d’un air supérieur et je me suis résolu à l’empoisonner. Dès le moment où il a avalé ses croquettes recouvertes d’arsenic je me suis empressé de me débarrasser de l’encrier car il aurait pu écrire une lettre de dénonciation.

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