Ce qui est essentiel

Poing de vue

Par | Journaliste |
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Pour que la culture ne soit plus fantomatique... Photo prise, ce dimanche à StillStandingForCulture place de la Monnaie à Bruxelles, © Jean-Frédéric Hanssens

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Le vocabulaire n’est jamais innocent. Le confinement concerne à éviter les contacts sociaux épars et donc, les limiter à l’essentiel. Mais qu’est-ce qui est essentiel? Et par conséquent, non-essentiel? Tout classement, comme tout choix, est un renoncement. Les pays européens se distinguent par la variabilité extrême de la définition du terme non-essentiel. En Suède, je peux aller au restaurant; au Luxembourg, au cinéma. En France, je rentre à 18 heures (avant le soleil!), aux Pays-Bas à 21, en Flandre à 24, à Bruxelles et en Wallonie à 22. Mais le terme lui-même est blessant pour qui n’est pas essentiel.

Or cela fait bien longtemps que l’on affirme que l’homme ne se nourrit pas que de pain. Et pourtant, la culture, quel désastre! Une résistance douce se fait jour, comme en toute chose. Les mesures sont ignorées délibérément. Faire ses courses en couple, omettre le masque où l’on suppose le danger faible, ou alors, partir en vacances, que sais-je encore? La population détermine elle-même ses propres critères, rassurée par les paliers et les vaccins.

Or les vaccins n’éliminent pas le virus; celui-ci continue à circuler. La vaccination ne sert pas qu’à éviter l’engorgement des hôpitaux: elle sert à diminuer le risque de développer les formes graves de la maladie, ce qui a pour conséquence d’alléger la charge hospitalière. Cependant la mesure n’est valable que si elle est accompagnée du reste, les gestes barrière, la distanciation sociale, qui n’est pas que quelques dizaines de centimètres d’une personne à l’autre – sans compter que la prudence reste de mise avec les variants qui forcément, sont plus méchants que la forme classique, sinon ils disparaîtraient aussitôt la mutation effectuée. Alors que faire? D’une part arrêter cet excès de vocabulaire qui rappelle le mot de Camus. En nommant mal les choses, on ajoute au malheur du monde. Utiliser non pas des euphémismes, mais des mots justes. La preuve que la culture n’est pas non-essentielle, c’est le succès des librairies, de Netflix, des chaînes de télé dédiées! De l’autre penser que le beau temps revenant, les terrasses, même si elles ne sont pas essentielles en temps ordinaire, constituent une option raisonnable, pour ne prendre que cet exemple. Mais ne jamais oublier que la seule chose qui n’est pas non-essentielle, c’est la vie. Dans un monde du hic et nunc, le pari de Pascal s’inverse: tout plutôt que la mort. Attitude assez neuve, en fait, que ce renoncement au fatalisme de jadis… Liée peut-être à l’instinct de survie mais aussi à l’extinction des croyances obsolètes. Lorsque Dieu meurt, le paradis perd en crédibilité.

 

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