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Tous les trois mois, Vidéo Express diversifie son public en consacrant sa vitrine à 80 DVD sur une thématique particulière. Certains usagers tentent même de louer l'ensemble de ces perles rares sélectionnées par des personnalités ou des associations.

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Lecture 26 min.

L’auteur de cette lettre est gay et ne cherche pas à faire du prosélytisme. Bien entendu, il est sans doute mieux informé sur cette thématique. Par contre, lorsqu’une information ou une réflexion «gay» peut intéresser tous les publics, elle est traitée par Consoloisirs à condition, bien sûr, qu’elle intéresse directement les usagers de la culture et/ou des médias. Le hasard fait que cela se passe à deux reprises dans cette newsletter de juin 2018. À vous de découvrir où! Bonne lecture.

SOMMAIRE

1. Voici le classement de 1 à 20
2. Cinq musées à Anderlecht
3. On a évité le télé-achat à la RTBF
4. Pas de festivals d’été pour Bertrand Cantat
5. Pour que votre visite se déroule bien
6. KANAL a-t-il oublié sa journée de gratuité mensuelle?
7. «Champion», la série mal aimée des téléspectateurs de la RTBF
8. France Télévisions, alliée de la malbouffe
9. Quels livres proposés à un jury pour qu’il décerne son prix?
10. Dix règles pour un théâtre

1. Voici le classement de 1 à 20

Puisque désormais sur internet presque tout s’achète ou se vole (pourtant créateurs et distributeurs méritent d’être payés pour leur labeur), les loueurs de DVD ont la vie particulièrement dure.
Ce ne sont peut-être pas les plus commerciaux qui auront la vie sauve. À l’inverse de ceux-ci, «Vidéo Express» qui sélectionne plutôt la qualité et la diversité déploie petit à petit son public en demandant à des personnalités ou des groupes d’individus (un réalisateur, une association environnementale ou une salle de cinéma comme le Nova) de sélectionner 80 de leurs œuvres chéries ou trouvailles qui sont placées en vitrine et mises en location durant un trimestre.
Ceci permet d’attirer de nouveaux clients mais l’initiative aiguise souvent aussi la curiosité du public qui fréquente déjà l’officine. L’expérience montre que certains s’efforcent de découvrir jour après jour toute la sélection pour pénétrer un univers qui leur est inconnu jusqu’alors.

Pendant les trois prochains mois, ce seront 80 DVD gays, de «Certains l’aiment chaud» (1959) à «120 battements par minute» (2017). La sélection a été réalisée par Bernard Hennebert, auteur de «Une vie à séduire», Coup de Cœur du Prix du Roman Gay.

Ses critères (subjectifs bien entendu, et ce n’est pas un défaut): privilégier quelques œuvres moins connues, sélectionner celles qui ont joué un rôle historique et qui conservent leur panache, donner un coup de pouce à quelques-unes proches du thème de son livre (des rencontres où l’écriture joue un rôle: des lettres d’amour ou de rupture apportées par le facteur jusqu’aux échanges sur internet ou les sms).
Il y a aussi quelques films qui ont marqué sa vie privée. Une projection de «Pink Narcissus» dans l’Orangerie du Botanique (grand centre culturel à Bruxelles), le 18 avril 1992, lui permit de rencontrer Benoit avec qui il s’est marié et avec qui il continue aujourd’hui de partager la vie.

Le grand lauréat est «Plan B» de Marco Berger. Ce film argentin de 2009 ne privilégie aucun type de sexualité: deux hommes s’approchent l’un de l’autre pour (re)conquérir la même femme. À peut-être ne pas mettre entre toutes les mains… mais bien pour toutes les paires d’yeux au cœur sensible. À (re)découvrir.

«Vidéo Express» se visite comme un musée qui exposerait le patrimoine cinématographique, et les séries, et les documentaires. Il est ouvert tous les jours de 12H00 à 23H00, au 241, Chaussée de Waterloo à Saint-Gilles (métro Horta). Et comme le rappelait un article publié dans La Capitale du 17 mai 2018: «Le coût de la location s’élève à 2,48 euros, prix inchangé depuis le passage à l’euro».

Jusqu’au début de l’automne, «Vidéo Express» propose également l’exposition des photos de Didier Seynave qui illustrent des extraits du livre «Une vie à séduire».

Allez donc sur place pour découvrir la sélection de 21 à 80. Et voici déjà le Top 20 pour vous mettre en appétit:

1. Plan B (Marco Berger, 2009, Argentine)
2. 120 battements par minute (Robin Campillo, 2017, France)
3. Lettres d’amour d’un inconnu (Yariv Mozer, 2015, Israël)
4. Le Cercle (Stefan Haupt, 2014, Suisse)
5. Une journée particulière (Ettore Scola, 1977, Italie)
6. Le Sexe des anges (Xavier Villaverde, 2012, Espagne et Brésil)
7. Théo & Hugo dans le même bateau (Olivier Ducastel et Jacques Martineau, 2016, France)
8. Week-end (Andrew Haigh, 2011, Royaume-Uni)
9. Certains l’aiment chaud (Billy Wilder, 1959, États-Unis)
10. Pride (Matthew Warchus, 2013, Royaume-Uni)
11. Les invisibles (Sébastien Lifshitz, 2012, France)
12. A Single Man (Tom Ford, 2009, États-Unis)
13. Philadelphia (Jonathan Demme, 1993, États-Unis)
14. Je suis à toi (David Lambert, 2014, Belgique et Canada)
15. The Normal Heart (Ryan Murphy, 2014, États-Unis)
16. El Tercero (Rodrigo Guerrero, 2015, Argentine)
17. Harvey Milk (Gus Van Sant, 2008, États-Unis)
18. Maurice (James Ivory, 1987, États-Unis)
19. Le Secret de Brokeback Mountain (Ang Lee, 2005, États-Unis)
20. Pink Narcissus (James Bidgood, 1971, États-Unis)

C’est une organisation de l’ASBL «Les amis du Vidéo Express»
Contact: unevieaseduire@gmail.com

2. Cinq musées à Anderlecht

La prochaine fête de la gratuité «du premier dimanche du mois» se déroulera le 1er juillet dans cinq musées d’Anderlecht: la maison d’Erasme, le Musée de la Médecine, le Musée du Béguinage, la Maison des Artistes et le nouveau Monumento.

Une newsletter mensuelle spécifique vous met au courant des différentes nouveautés de cette gratuité du premier dimanche.
Inscription: info@artsetpublics.be

3. On a évité le télé-achat à la RTBF

Je fais partie de la minorité des personnes qui osent imaginer que les morts, n’étant plus soumis aux pressions de la vie quotidienne, considèrent, s’ils pensent encore dans un au-delà, que la meilleure façon de leur rendre hommage, consiste à rappeler qu’elle était leur personnalité réelle, avec qualités et défauts.

N’oubliant bien entendu pas les qualités de conteur de Pierre Bellemare qui vient de décéder, Consoloisirs tient ici à rappeler deux éclairages bien belges d’une de ses importations des USA en France: le télé-achat.

Comme le souligne sur les réseaux sociaux l’un de ses proches, Marco Pezzin: «Concernant le télé-achat, Pierre était passionné par les objets, parfois même collectionneur. Il pouvait raconter toute une histoire autour d’un objet usuel, en le mettant en situation. Il le faisait avec conviction et nous disait souvent qu’il fallait que l’objet aille à la bonne personne. L’idée n’était certainement pas de vendre n’importe quoi à n’importe qui (…)».

Hélas, lorsqu’on observe aujourd’hui l’évolution du télé-achat, on se dit que Bellemare n’y retrouverait sans doute ses jeunes! Et avec cette technique, il n’aura pas influencé que le paysage audiovisuel français. Comme le rappelle Xavier Diskeuve dans le quotidien L’Avenir: «(…) En juin 1998, Pierre Bellemare était à Gosselies avec toute une jeune équipe, et lançait LTA, la première chaîne de téléachat en Belgique francophone. Elle fonctionnera sous divers avatars pendant quatre ans».

Le télé-achat est sans doute le symbole même de la télé privée: émettre pour vendre le plus possible. Voilà pourquoi la non présence de pareil programme est un des éléments qui devrait différencier les télévisions de service public. Hélas…

À propos de Jean-Louis Stalport qui fut administrateur général de la RTBF jusqu’à son décès (de 1993 à 1997), Marc Moulin indiquait: «(…) Il fut le premier top manager de la RTBF. Il fut affirmé au PS comme un fait de bon sens que pour diriger une entreprise comme la RTBF, il fallait à tout prix un «pur gestionnaire». Pas un homme du sérail, ni du métier. Surtout pas (…)». En 1995, Monsieur Stalport voulut financer la création d’un journal télévisé quotidien de la mi-journée notamment par les bénéfices de la mise en place d’un télé-achat avec une filiale de TF1.

Le projet de ce nouveau JT aboutira. Il sera dénommé à l’époque «Le 12H45» pour tenter de devancer les concurrents qui pratiquaient «Le 13H». Mais à 12H45, les téléspectateurs de la RTBF avaient droit à une simple annonce du sommaire qui constituait à lui seul d’une émission d’une minute environ… suivie d’un interminable tunnel de pubs.

Par contre, le télé-achat ne verra jamais le jour. Quelques administrateurs de la RTBF sortirent du bois et sensibilisèrent le monde associatif. Notamment l’Association des Téléspectateurs Actifs fit front. Le débat devint public également grâce à la mobilisation de la CGSP RTBF du Centre de Charleroi où aurait dû être réalisée l’émission.

Les noms d’oiseaux volèrent. Les opposants aux télé-achat ertébéen furent régulièrement traités d’ «intégristes», notamment dans l’hebdo de La Ligue des Familles, «Le Ligueur» (25/10/1995), par le chroniqueur attitré Jean Couchard… qui était le frère du directeur de cabinet de Jean-Louis Stalport. Comme d’habitude, quand il est difficile de débattre du fond, on attaque gratuitement les messagers.

Ce rappel historique me semble avoir un intérêt: indiquer que lorsque quelques usagers de la RTBF mènent avec énergie une action collective publiquement, ils peuvent se faire entendre par les médias, par les responsables politiques, par le personnel de la RTBF et ses représentants syndicaux, et finalement par le conseil d’administration du service public. Ce n’est donc pas impossible. Non au fatalisme. Mais agissons ainsi plus précisément pour la mise en place d’évolutions utiles à tous!

4. Pas de festivals d’été pour Bertrand Cantat

Un artiste condamné mais qui a purgé sa peine peut-il remonter sur scène?
Les métiers publics (chanteur, comédien, politicien, journaliste, animateur radio-TV, enseignant… ou prêtre?) sont-ils différents des autres professions et peut-on revendiquer une double peine pour ceux qui les pratiquent?

Voici le début de la période des festivals d’été qui s’approche.
Il me semble utile donc de rappeler que Bertrand Cantat a pris l’initiative d’annuler ses prestations prévues dans ce cadre car il ne voulait pas imposer sa présence à des personnes qui fréquentent ces festivals pour découvrir d’autres artistes que lui.
C’est un geste volontaire de sa part car aucune législation ne l’y oblige puisqu’il a purgé la peine décidée par la justice.

À titre personnel, je ne suis pas un fan de cet artiste: je n’écoute pas son répertoire, je ne l’ai jamais vu en scène. L’acte pour lequel il a été puni m’a horrifié.
Je tiens simplement ici à (re)préciser cette situation. Consoloisirs soutient les droits des usagers culturels et donc notamment celui d’assister à des spectacles proposés par des artistes qui sont en ordre avec la justice ou qui, pour des errements ou fautes antérieures (notamment le contenu de CD anciens), se sont expliqués et/ou excusés.

Concernant l’annulation par l’Olympia de deux concerts de Bertrand Cantat à Paris fin mai dernier, il nous semble que la lettre de l’Observatoire de la Liberté de Création a adopté un ton modéré et va tout-à-fait dans le sens du respect des droits des usagers culturels.
À lire donc et partager sans modération.

5. Pour que votre visite se déroule bien

Le 16 mai 2018, j’ai envoyé l’e-mail suivant à la direction du Musée des Instruments de Musique (M.I.M.). Je vous communiquerai sa réponse dès qu’elle me parviendra.

«(…) Je tiens à déposer plainte auprès de vos services. Dans ma newsletter de mai 2018 diffusée à près de 20.000 destinataires, j’ai publié concernant le MIM le point n° 10 qui vous documente sur ma plainte.
Pour le MIM, un nouveau flyer vient d’être imprimé en plusieurs langues. Il indique les nouveaux tarifs mais n’avertit pas le futur visiteur de l’importance de louer l’audioguide.
Lors de la réimpression de ce flyer, pourriez-vous vous engager à y indiquer clairement l’importance de louer l’audioguide pour les visites individuelles? (…)».

6. KANAL a-t-il oublié sa journée de gratuité mensuelle?

L’asbl la Ligue des Usagers Culturels (L.U.C.) va se lancer dans le combat suivant qui sera sans doute long mais il permettra peut-être de voir appliqué ce qu’on peut définir comme un droit des visiteurs: lorsqu’un musée est fortement financé avec de l’argent public et qu’il pratique une tarification parmi les plus élevées de la région où il est établi, il est normal qu’il propose au moins une journée mensuelle de gratuité pour tous.

Si vous êtes d’accord de soutenir et de participer à ce combat, envoyez donc vos coordonnées maintenant à: liguedesusagersculturels@gmail.com
Par exemple, connaissez-vous un des membres du conseil d’administration de KANAL (voir les noms plus loin) et pourriez-vous l’intéresser à notre combat?

De quoi s’agit-il?

Le prix de l’accès au musée bruxellois «KANAL - Centre Pompidou», pour sa phase de préfiguration (jusqu’au 10 juin 2019), est de 14 euros (avec diverses réductions).

Pour visiter le Musée Magritte, il faut débourser actuellement 8 euros, ou le Musée du Cinquantenaire, 10 euros. De nombreux autres musées bruxellois pratiquent des tarifications bien plus accessibles au vaste public. Un exemple: situé à Molenbeek, de l’autre côté du canal, l’un des voisins de KANAL s’appelle La Fonderie (le Musée bruxellois des industries et du travail) et il propose son entrée à 5 euros (avec diverses réductions).

Donc KANAL, alors qu’il n’est même pas encore vraiment ouvert et avant travaux, se taille la part du lion. Et son appétit économique pourrait donner des idées à d’autres institutions bruxelloises qui rêvent sans doute de ne pas être les premières à appliquer une tarification «à la Parisienne».

C’est son droit de pratiquer une tarification aussi élevée mais elle semble une fort mauvaise réponse à l’éditorial du «Soir» célébrant sa naissance sous la plume de Véronique Lamquin («Un projet qui fait un bien fou à Bruxelles», 3 mai 2018): «Oui, le choix du site est courageux autant qu’évident. Le canal reste une fracture; la résorber, en œuvrant au renouveau social, économique, urbanistique, est une priorité absolue pour les autorités bruxelloises». Pour les habitants? Ou plus précisément pour les amateurs d’art contemporain et certains touristes?

Bien entendu, il y a les réductions, mais il n’y aura pas un prix d’excellence ici non plus pour les options de KANAL. Par exemple, la réduction pour les seniors s’adresse «aux plus de 65 ans» comme dans les musées fédéraux. C’est oublier que de nombreux autres musées en Belgique ou en Europe pratiquent cet avantage pour «les plus de 60 ans». C’est donc à nouveau le choix du plus onéreux qui s’opère jusqu’à présent, peut-être dissuasif en terme de politique de démocratisation de la culture.

Des «pratiques» aussi intéressantes que celle de BOZAR (bien que le patron de celui-ci fait partie du conseil d’administration de KANAL) n’ont pas été prises en compte: 2 euros, chaque mercredi, pour les moins de 26 ans et les demandeurs d’emploi.

Là où la ligne rouge est franchie par KANAL, c’est lorsque cette institution culturelle semble ignorer ou effacer l’histoire économique de nos musées et celle des droits conquis petit à petit ces dernières années par les visiteurs et le secteur associatif.
C’est en 1997 que les grands musées bruxellois mirent fin à leur gratuité quotidienne selon la décision du ministre de la Politique Scientifique Yvan Ylieff. Le 3 septembre de la même année, le même ministre officialisa la mise en place d’une gratuité mensuelle «dans le souci de favoriser la visite au musée pour le plus grand nombre».
Rien de tel jusqu’à présent à KANAL alors qu’une vingtaine d’années plus tard près de deux cents musées ont mis en pratique en Belgique pareille gratuité (le premier mercredi ou le premier dimanche du mois).

Contactée sur ce dernier point, Séverine Provost, General Manager de BE CULTURE (l'agence de communication engagée par le musée), convient: «KANAL n’a pas encore fixé de jour gratuit».

Il s’agit donc de faire désormais pression pour qu’une «journée de gratuité» soit acquise lorsque le musée sera dans sa phase d’ouverture définitive. Cette réflexion est urgente car Rudi Vervoot, le ministre-président de la Région bruxelloise, a déclaré à la presse que le business plan de KANAL sera adopté en juillet 2018.

Nous avons posé d’autres questions à Madame Provost concernant cette future journée de gratuité mensuelle à KANAL:

- 1: Qui décidera cette gratuité?
Réponse: Le conseil d’administration.

- 2: Si c’est le conseil d’administration, pouvez-vous nous indiquer qui en fait partie et en fonction de quels critères ont été choisi les administrateurs?
Réponse: Désigné par le gouvernement sur base des compétences (pas de représentants politiques dans le CA).
Les membres du Conseil d’administration sont:

  • Michèle Sioen, Présidente
  • Denis Laoureux, Vice-Président
  • Hervé Charles
  • Stéphanie Pecourt
  • Diane Hennebert
  • Willem Elias
  • Laurent Busine
  • Isabel Raemdonck
  • Yves Goldstein
  • Alain Berenboom
  • Paul Dujardin

- 3: Pouvez-vous nous indiquer à quelle date cette gratuité sera décidée?
Réponse: Les tarifs ont été approuvé par le CA du 21 mars et son disponibles sur le site internet de la Fondation. Il s’agit des tarifs pour la période de 13 mois de préfiguration. Pas des tarifs du futur musée.

- 5: Ne pourriez-vous à propos de cet important sujet en terme de démocratisation culturelle associer les visiteurs à la préparation de votre décision en organisant sur ce thème précis un débat public contradictoire (par exemple, choisir entre la demi-journée de gratuité mensuelle des musées fédéraux, chaque premier mercredi du mois, ou rallier les 150 musées belges qui pratiquent la gratuité d’une journée entière, chaque premier dimanche du mois), si possible relayé dans les médias?
Réponse: Pas d’actualité dans cette phase de préfiguration.

7. «Champion», la série mal aimée des téléspectateurs de la RTBF

On nous fanfaronne depuis quelques années déjà que le nouveau filon en or pour la RTBF, ce sont nos séries made in Belgique francophone. Ainsi, progressivement, l’atout majeur du service public change. C’était l’information, pour les prédécesseurs de l’administrateur actuel, Jean-Paul Philippot. Du moins dans leurs déclarations publiques.
Et c’est aujourd’hui le divertissement dont «nos» séries (en plus de la diffusion massive des autres séries).
Ce n’est pas anodin. Il faut de tout à la télé, bien entendu, mais les dosages évoluent. Ceci mérite réflexion en terme de priorités de service public au moment où celui-ci ne peut pas tout se permettre financièrement parlant.

En mai 2018, diffusion le mardi sur La Une, de 20H20 à 22H10, des premiers épisodes de «la» nouvelle série (prélude au «Mondial») présentée comme «tragicomique belge»: «Champion». La première semaine, les audiences sont décevantes pour pareil créneau de diffusion (209.331 téléspectateurs).

Personnellement, j’ai été informé, la semaine suivante, de la suite de diffusion de cette série par la «une» de «Metro» du mardi 22 mai 2018. Pas par du rédactionnel mais bien par une publicité qui barre tout le bas de cette page.
Le même jour, d’autres publicités d’un volume analogue occupent les bas des pages d’autres quotidiens comme «le Soir» (page 29) «la Dernière Heure» (dans le supplément sportif) ou Sudpresse (page 18).

D’où mes réflexions:

1. Je n’ai pas mémoire de pareille démarche publicitaire récente pour des émissions consacrées à l’éducation permanente en insuffisance d’audience;

2. Faire croire que le public de la RTBF adore le divertissement sans qu’il y soit entraîné est peut-être un peu erroné. «Le public ne peut recevoir que ce qu’on lui donne» expliquait naguère Patrick Sabatier, l’animateur de divertissements télévisés;

3. J’ai toujours revendiqué l’idée que la publicité à la RTBF coûte. Effectivement, la recherche d’un public jeune qui est l’une des cibles préférées des annonceurs se fait notamment par la programmation de plus en plus fréquente au prime-time de séries… et l’on voit ici que cela coûte en investissements publicitaires;

4. Pour aller plus loin dans la réflexion, il faudrait que la RTBF livre tous ses chiffres au public. Mais elle considère que ce sont des secrets économiques (alors que les subventions diverses couvrent près de 80% de son budget). Rappelons que pour «The Voice», si la RTBF a communiqué sur ce que cette émission de divertissement rapportait en terme de publicité, elle n’a jamais daigné informer de ce que sa production, sa diffusion et sa médiatisation coûtaient réellement. Bref, tout est fait pour que le public ne puisse réfléchir de façon argumentée à cette thématique.

En tant que téléspectateurs, comme nous n’avons pas droit à découvrir les détails de la gestion économique de la RTBF, il ne nous est donc pas possible de savoir s’il s’agit ici d’insertions publicitaires ou d’échanges publicitaires entre médias. Ceci ne change pas grand chose à nos interrogations comme le fait que des missions de la RTBF comme l’éducation permanente n’ont pas droit au même traitement.

Le public résiste! Lors de la seconde semaine de diffusion, et malgré l’important effort promotionnel ertébéen, les 3ème et 4ème épisodes de la nouvelle série estampillée «RTBF-Fonds Série de la Fédération Wallonie-Bruxelles» ont attiré encore moins de téléspectateurs: on passe de 209.331 à 160.640.
Dès la troisième semaine, la diffusion de «Champion» sera rétrogradée du prime-time de La Une à celui de La Deux. Hélas, pour cette diffusion du 29 mai 2018, le recul sera à nouveau catastrophique puisqu’on dégringole à 52.000 téléspectateurs.

Michaël Degré a émis cinq hypothèses de cet échec dans L’Avenir, dès le 25 mai 2018.

On comprend tout-à-fait que le lobby des personnes qui ont des intérêts économiques dans la production des séries ait fait compagne et pression auprès du monde politique et médiatique pour tenter d’imposer l’idée que le public de la RTBF adore les nouvelles séries «de chez nous».
Mais quand on défend les intérêts des téléspectateurs, on est moins d’accord avec le fait que cette idée tend à perdurer ici et là alors que, si les deux premières séries ont bien marché («La Trêve» et «Ennemi public»), il n’en est pas de même pour «Unité 42», «e-Legal» et, désormais, «Champion».
À l’inverse de que ce que la RTBF publiait, les séries ne reviennent pas en force.

Selon Sudpresse (28/05/2018), la série «Champion» a «(…) coûté cher au service public: 275.000 euros par épisode». Et deux épisodes sont diffusés par soirée!

Pour vous faire votre propre idée… et développer les audiences de «Champion», retrouvez ici les épisodes 5 et 6 à visionner avant le 12 juin 2018.

8. France Télévisions, alliée de la malbouffe

Depuis six mois environ, au niveau européen, a été mis en place le «Nutri-Scole», un code qui doit se retrouver sur les emballages des produits que vous consommez: les lettres (de A à E) et des couleurs (de vert à rouge) qui nous indiquent la qualité nutritionnelle de ce que nous allons choisir d’éventuellement consommer: du meilleur au pire.

En France, le 27 mais 2018, l’Assemblée Nationale a rejeté l’amendement qui voulait obliger les chaînes de télévision à faire apparaître ce pictogramme dans les publicités alimentaires diffusées sur le petit écran.

On peut comprendre que cette proposition irrite fortement le secteur agroalimentaire et aussi les chaînes privées dont la principale ressource est publicitaire.

Mais la lettre que ceux-ci ont envoyé au premier ministre pour refuser de signaler dans leurs publicités la nocivité des produits alimentaires fut également signée par Delphine Ernotte pour France Télévisions.

C'est ici que l’on voit que les intérêts de la direction d'un service public et ceux de ses usagers sont diamétralement opposés parce qu’elle veut accueillir un maximum de publicités sur ses antennes et contenter ses annonceurs.
Voilà pourquoi il faut supprimer totalement la publicité mais également le sponsoring (puisque celui-ci a pris la place de la publicité sur France Télévisions après 20H).

9. Quels livres proposés à un jury pour qu’il décerne son prix?

L’un de mes livres ayant été remarqué, il y a quelques années déjà, pour le Prix du Roman Gay, je suis informé régulièrement des préparatifs pour les sessions suivantes de cette joute.
Pour 2019, vous pouvez déjà découvrir ici les couvertures de la trentaine de livres qui ont posé leur candidature. Ceci donne une petite idée, une esquisse de la production dans ce domaine spécialisé.
Comme l’indique le règlement, les lecteurs peuvent encore ajouter des propositions d'autres écrits qui pourraient remporter les palmes de 2019.

10. Dix règles pour un théâtre

Le nouveau directeur artistique du théâtre NTGent est le metteur en scène suisse Milo Rau.
Il vient de publier son «Manifeste de Gand», à savoir des règles de conduite pour les spectacles qui seront appliquées dans son lieu de travail.
Certaines d’entre elles peuvent donner à réfléchir à d’autres institutions théâtrales.

  • Un: Il ne s’agit plus seulement de représenter le monde. Il s’agit de le changer. Le but n’est pas de représenter le réel, mais bien de rendre la représentation réelle,
  • Deux: Le théâtre n’est pas un produit, c’est un processus de production. La recherche, les castings, les répétitions et les débats connexes doivent être accessibles au public,
  • Trois: La paternité du projet incombe entièrement à ceux qui participent aux répétitions et aux représentations, quelle que soit leur fonction – et à personne d’autre,
  • Quatre: L’adaptation littérale des classiques sur scène est interdite. Si un texte – qu’il émane d’un livre, d’un film ou d’une pièce de théâtre – est utilisé, il ne peut dépasser plus de 20% de la durée de la représentation,
  • Cinq: Au moins un quart du temps des répétitions doit se dérouler hors d’un espace théâtral, sachant que l’on entend par espace théâtral tout lieu dans lequel une pièce de théâtre a déjà été répétée ou jouée,
  • Six: Au moins deux langues différentes doivent être parlées sur scène dans chaque production,
  • Sept: Au moins deux des acteurs sur scène ne peuvent pas être des acteurs professionnels. Les animaux ne comptent pas, mais ils sont les bienvenus,
  • Huit: Le volume total du décor ne doit pas dépasser vingt mètres cubes, c’est-à-dire pouvoir être transportable dans une camionnette de déménagement conduite avec un permis de conduire normal,
  • Neuf: Au moins une production par saison doit être répétée ou présentée dans une zone de conflit ou de guerre, sans aucune infrastructure culturelle,
  • Dix: Chaque production doit avoir été montrée dans minimum dix lieux répartis dans trois pays au moins. Aucune production ne pourra quitter le répertoire de NTGent avant d’avoir atteint ce nombre.

Et pour terminer...

Voici la mise en ligne de mes lettres les plus récentes:

2018

  • Mai 2018: 13 infos dont «Deux toiles majeures invisibles plusieurs mois»
  • Avril 2018: 9 infos dont « Retour probable de la «gratuité du premier dimanche» au Musée d’Ixelles »
  • Mars 2018: 16 infos dont «C’est la dernière fois que je vous parle de Michel Sardou!»
  • Février 2018: 10 infos dont «La presse titre enfin: «Les musées Wiertz et Meunier se meurent»

2017

  • Décembre 2017: 11 infos dont «Les horaires des bibliothèques respectent-ils la population active?»
  • Novembre 2017: 9 sujets dont «La RTBF doit arrêter de copier les méthodes du privé»
  • Octobre 2017: 11 sujets dont «Au MIM, les instruments de musique sont muets»
  • Septembre 2017: 1 seul sujet: «Mes 50 ans avec Magritte»
  • Juin 2017: 10 sujets dont «Nouveauté au très beau musée Van Buren à Uccle»
  • Mars 2010: 7 sujets dont «Quand les Musées Royaux des Beaux-Arts de Belgique répondront-ils enfin à nos questions?
  • Février 2017: 10 sujets dont «Tintin au Pays des Soviets: sa couverture bientôt remaniée»
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2016

 

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