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Les indignés

Par | Journaliste |
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Domenico Lucano, maire de Riace en Italie, lourdement condamné pour avoir accueilli des migrants. Photo © Wikipedia

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Voici la lettre qu’a lue Domenico Lucano, maire de Riace, le 3 octobre 2021- sur la place de Riace, après avoir été très lourdement condamné fin septembre pour avoir aidé des migrants. Voici ce qu’en disait le correspondant de Libération à Rome : « Domenico Lucano, le maire qui a fait renaître un petit village de Calabre en y accueillant des dizaines de migrants, a écopé de treize ans et deux mois de prison, à la grande satisfaction de l’extrême-droite italienne. » le journaliste souligne que le tribunal a été au-delà de la demande du procureur que ne demandait « que » 6 ans de prison.

« Un verdict de plomb réservé généralement aux complices de Cosa nostra ou aux grands criminels. Mimmo Lucano était, lui, accusé d’escroquerie, d’abus de biens sociaux, de fraude aux dépens de l’Etat et d’aide à l’immigration clandestine. », énumère le journaliste.

Ce verdict extrêmement sévère trahit l’hire de l’extrême-droite italienne qui refuse que des migrants puissent sauver des villages italiens en perdition et y amener un nouveau développement économique et social.

« Ayez le courage d'être seul »

« Il est inutile de vous dire que j'aurais aimé être présent parmi vous non seulement pour des salutations formelles, mais pour quelque chose de plus, pour parler sans le besoin et les obligations d'avoir à écrire, pour ressentir ce sentiment de spontanéité, pour ressentir l'émotion qui les mots produisent de l'âme, enfin pour vous remercier un à un, à tous, pour une forte étreinte collective, avec toute l'affection dont les êtres humains sont capables.

A vous tous qui êtes un peuple en chemin vers un rêve d'humanité, vers un lieu imaginaire de justice, chacun mettant de côté ses engagements quotidiens et défiant même les intempéries. Je dis merci.

Le ciel traversé de nombreux nuages ​​sombres, les mêmes couleurs, la même vague noire qui traverse les cieux d'Europe, qui ne laisse plus entrevoir les horizons indescriptibles de pics et d'abîmes, de terres, de douleurs et de croix, de la cruauté des nouvelles barbaries fascistes.

Ici, dans cet horizon, les peuples sont là. Et avec leurs souffrances, leurs luttes et leurs conquêtes. Parmi les petites choses de la vie quotidienne, les faits se croisent avec les événements politiques, les problèmes cruciaux de tous les temps avec les menaces renouvelées d'expulsion, d'attentats, de mort et de répression.

Aujourd'hui, dans ce lieu frontalier, dans ce petit pays du sud de l'Italie, terre de souffrance, d'espoir et de résistance, nous vivrons une journée qui sera destinée à entrer dans l'histoire.

Nous sommes l'histoire. Avec nos choix, nos croyances, nos erreurs, nos idéaux, nos espoirs de justice que personne ne pourra jamais réprimer.

Il viendra un jour où il y aura plus de respect pour les droits de l'homme, plus de paix que de guerres, plus d'égalité, plus de liberté que de barbarie. Où il n'y aura plus de gens voyageant en classe affaires et d'autres entassés comme des biens humains des ports coloniaux avec leurs mains accrochées aux vagues dans les mers de la haine.

Je n'ai pas grand-chose à ajouter à ma situation personnelle et à mes affaires juridiques par rapport à ce qui a été abondamment raconté. Je n'ai aucune rancune ou réclamation contre qui que ce soit.

Mais je voudrais dire au monde entier que je n'ai rien à avoir honte, rien à cacher. Je faisais toujours les mêmes choses, ce qui donnait un sens à ma vie. Je n'oublierai pas cet immense fleuve de solidarité.

Je te porterai longtemps dans mon cœur. Nous ne devons pas reculer, si nous sommes unis et restons humains, nous pourrons caresser le rêve de l'utopie sociale.

Je vous souhaite le courage d'être seul et l'audace de rester ensemble, sous les mêmes idéaux.

Pouvoir être désobéissant chaque fois que nous recevons des ordres qui humilient notre conscience.

Nous méritons d'être appelés rebelles, comme ceux qui refusent d'oublier à l'époque de l'amnésie forcée.

Être assez têtu pour continuer à croire, même contre toute évidence, qu'il vaut la peine d'être des hommes et des femmes.

Continuer à marcher malgré les chutes, les trahisons et les défaites, car l'histoire continue, même après nous, et quand elle dit au revoir, elle dit au revoir.

Nous devons espérer garder vivante la certitude qu'il est possible d'être contemporains de tous ceux qui vivent animés par le désir de justice et de beauté, où que nous soyons et où que nous vivions, car les cartes de l'âme et du temps n'ont pas de frontières. »

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https://www.liberation.fr/international/europe/crise-migratoire-en-italie-le-maire-de-riace-condamne-a-une-lourde-peine-de-prison-20210930_ZM2C3R46UBCIFEFOKSUY7QFT6I/

 

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