Quelles violences faites aux femmes?

Les indignés

Par | Journaliste |
le

Anne Morelli. Photo © UPJB

commentaires 0 Partager
Lecture 3 min.

Historienne, professeure à l'ULB et féministe de longue date, Anne Morelli répond, dans Le Soir du 5/3/2018, à un collectif de 164 signataires critiquant l'organisation d'un colloque organisé le 7 mars par le Parlement de la Fédération Wallonie-Bruxelles sur le thème "Egalité femmes hommes: où en est-on?". La critique porte sur la mise en question du mouvement #metoo.

Je suis étonnée que certaines "féministes" aient refusé de participer au débat prévu au parlement de la C.F. et auquel je serai présente. Le débat ne portera évidemment pas sur la légitimité de la violence faite aux femmes (!) mais sur la définition de la violence, sur ses degrés de gravité, les sanctions, les droits de la défense.

Je suis femme de débat. J'ai dialogué publiquement avec Mgr Léonard et Tariq Ramadan. Pourtant nous étions loin d'être sur la même longueur d'ondes ! Le refus de débattre et d'argumenter est l'essence même de l'intolérance.

Faut-il que je présente des "états de service à la cause des femmes"? Je n'en manque pas. C'est incroyable de me présenter comme "anti-féministe" alors que depuis les années '80 je donne à l'ULB (pour la dernière fois cette année) un cours qui a alerté plus de 5000 étudiant(e)s au fil des années (et 200 encore cette année) sur l'aliénation des femmes, la domination masculine, le patriarcat. Je pense que c'était le premier cours de ce type dans les universités belges. Déjà en 1989 nous présentions une exposition qui a beaucoup circulé et qui s'intitulait "Femmes, Libertés, laïcité". Avec Eliane Gubin et quelques autres collègues, nous avons fondé à l'ULB le GIEF, groupe d'études féministes, et publié depuis plus de 25 ans la revue "Sextant" qui a consacré ses recherches à l'histoire des femmes et aux thèmes du féminisme. J'en ai coordonné plusieurs numéros sur les femmes migrantes (la fameuse intersectorialité classe/race/genre) les femmes exilées politiques et, tout récemment, le n° de 2017 intitulé "Les femmes aiment-elles la guerre ?"

Seules en Belgique, nous avons publié, avec Claudine Marissal, un manuel d'histoire mettant en relief le rôle des femmes dans l'histoire, ce qui nous semble important pour que les filles aient des modèles positifs.

J'ai présidé « Femmes pour la Paix » et la "Fondation Gatti de Gamond" qui diffuse les idées féministes de sa fondatrice auprès d'élèves du secondaire.

J'ai préféré à la délation l'éducation. Les gesticulations des vedettes du "star system" américain détournent l'attention des problèmes réels du quotidien des femmes. J'accorde plus d'importance, je l'avoue, à l'ouvrière Antonia Gargiulo, abattue la semaine dernière à Velletri (Italie) par son mari dont elle voulait se séparer. Elle avait déjà plusieurs fois dénoncé son comportement violent mais personne n'avait réagi !

Il semble que vous appréciez cet article

Notre site est gratuit, mais coûte de l’argent. Aidez-nous à maintenir notre indépendance avec un micropaiement.

Merci !

Les féminicides du quotidien m'inquiètent davantage que la main aux fesses des millardaires américaines d'Hollywood. Les femmes vivent aujourd'hui, avec le détricotage de la Sécurité sociale, des violences économiques qui sont ma préoccupation première. Avec « Metoo », le néo-libéralisme, qui crée cette fragilité des femmes, n'a rien à craindre. Les dénonciations spectaculaires de cette campagne « Made in USA » créent une vague d'indignation qui retombe rapidement et n'affecte pas en profondeur le système de pouvoir au profit des hommes dans tous les secteurs de la société, contre lequel je lutte depuis très longtemps et continuerai de lutter.

 

commentaires 0 Partager

Inscrivez-vous à notre infolettre pour rester informé.

Chaque samedi le meilleur de la semaine.

/ Du même auteur /

Toutes les billets

/ Commentaires /

Avant de commencer…

Bienvenue dans l'espace de discussion qu'Entreleslignes met à disposition.

Nous favorisons le débat ouvert et respectueux. Les contributions doivent respecter les limites de la liberté d'expression, sous peine de non-publication. Les propos tenus peuvent engager juridiquement. 

Pour en savoir plus, cliquez ici.

Cet espace nécessite de s’identifier

Créer votre compte J’ai déjà un compte