Quentin Dujardin proteste avec sa guitare
Le 14 février à 15h, en l'église de Crupet, devant un public aussi réduit que clairsemé, le guitariste Quentin Dujardin a joué une seule de ses compositions à la guitare. Après la note ultime, le policier tenu de faire respecter la loi s'est avancé. Entre les deux hommes, chacun dans son rôle, l'échange aura été respectueux. Des photographes ont fixé ce moment où le musicien plaidait la cause des artistes empêchés de s'exprimer en raison du coronavirus. Juste avant son acte, au seuil de l'église, Dujardin avait clamé "Vive la démocratie". Se demandant pourquoi il lui était interdit de jouer en public alors qu'un service religieux est légal, à condition de respecter des règles de distance. En autorisant le concert rebelle, le prêtre responsable de l'église avait voulu montrer son soutien à une manifestation très civile.
Les vidéos et les photos ont fait le tour du net et les médias ont amplifié la protestation de Quentin Dujardin. Pour cet artiste, faire de la musique s'apparente à parler aux gens, à être avec les autres, conscient de ses responsabilités. Privé de guitare, il estime avoir perdu sa voix de citoyen et interpelle les autorités. Celles-ci, au plus haut niveau, aiment sans doute la musique, comme tout le monde. Confrontés à la nécessité de prendre des mesures pour limiter les ravages du virus, les acteurs politiques seraient des funambules, en équilibre précaire sur le fil du risque et des conséquences de leurs décisions. On ne voudrait pas être à leur place...
Depuis que j'ai entendu il y a des années déjà Quentin Dujardin jouer "Durnal sous la pluie", quand il pleut ses notes me semblent une écriture à la Simenon. On suit les zébrures de la drache et perçoit le reflet des phares sur l'asphalte de la route. Dujardin a bourlingué en Inde, dans le Namurois, en Afrique et ailleurs, en quête des musiques et des cultures qui se métissent. Il a joué avec Toots Thielemans, et des tas d'autres artistes, partageant avec ses images/notes ces rencontres qui donnent à la vie la plénitude de sa saveur. D'où le désarroi des artistes face au virus invisible qui leur interdit de rencontrer les gens, depuis un an...
C'est tout cela que le morceau égréné par Quentin a dit avec délicatesse, sans hausser la voix, avec fermeté cependant. Le débat qui va se dérouler au parlement devrait peut-être commencer par l'audition d'un air de guitare, histoire d'oxygéner les esprits et de préparer à la réflexion et à l'écoute.
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