Mundaneum, le rêve de paix mondiale

Zooms curieux

Par | Journaliste |
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En deux livres, un retour passionnant vers l'espoir d'un monde de paix.

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En cette période de propagande guerrière, de nationalisme exacerbé et de mépris total du droit international, il est absolument nécessaire de rappeler aux jeunes générations que la guerre n’est pas l’issue inéluctable des conflits entre Etats. La guerre est la négation de tout ce qui a été construit lentement par les Etats et les peuples pour édifier un nouvel ordre mondial symbolisé par les Nations Unies. Un ordre qui se base sur le rejet de l’horreur absolue que fut la deuxième guerre mondiale, et dans le souvenir de l’absurde et sale guerre de 14-18 qui fut suivie, en 1919, par l’instauration de la Société des Nations, préfiguration de Nations Unies.

Henri La Fontaine, prix Nobel de la Paix 1913

Les Belges en particulier et les Européens en général, peuvent s’enorgueillir de l’émergence d’une pensée mondialiste élaborée, précisée, diffusée inlassablement par un être exceptionnel : Henri La Fontaine, intellectuel bourgeois bruxellois devenu socialiste, franc-maçon, féministe et surtout, pacifiste.

Celui qui obtint la consécration suprême qu’est le prix Nobel de la Paix en 1913, a mené une vie politique, intellectuelle et militante extraordinaire. A lire la première biographie d’ampleur qui lui est consacrée, signée Pierre Van den Dungen, nous découvrons cette période bouillonnante d’idées nouvelles que fut la fin du XIXème siècle et le début du XXème, dans cette petite Belgique classée à la cinquième place des puissances mondiales. Et l’on suit avec passion l’élaboration de la pensée mondialiste et pacifiste d’Henri La Fontaine, avocat, pianiste, intellectuel, homme politique, et son art de combiner tous ses réseaux afin de réaliser ses idéaux. En le suivant dans ses nombreuses activités, on redécouvre les grands hommes politiques de l’époque comme Albert 1er, Charles Buls, Louis de Brouckère, Emile Vandervelde, Paul-Henri Spaak… De grandes dames comme Elisabeth de Belgique, Isabelle Gatti de Gamond et bien entendu sa sœur Léonie La Fontaine, égérie du féminisme belge, etc. De grands industriels et mécènes comme Ernest Solvay. Une vie trépidante qui n’empêche pas ce bourgeois érudit de contribuer puissamment au développement du Parti Ouvrier Belge, attaché qu’il était à l’idéal collectiviste basé sur la conscience profonde que l’humain ne peut se réaliser que dans la collectivité ainsi que le fait la nature.

Entre deux guerres

Il est frappant de constater certaines ressemblances entre la période que nous vivons actuellement et ce qui s’est produit entre les deux guerres : crise économique, colonialisme, libéralisme économique et consumérisme abêtissant, nationalismes, racisme et antisémitisme, réarmement et propagande de guerre.

Il faut relire le discours d’Henri La Fontaine prononcé lors de la première assemblée générale de la Société des Nations, le 15 novembre 1920.

A propos du colonialisme et des ressources naturelles spoliées : « Chacune des nations qui occupent ces territoires divers s’imagine qu’elle a, sur les biens naturels que produit son sol ou qui se trouvent dans son sous-sol, des droits réservés à elle seule, qu’elle est en quelque sorte propriétaire de ces éléments.

Cette idée, nous devons nous efforcer de la chasser de nos esprits. Ces produits servent à l’humanité tout entière et doivent être à la disposition de l’humanité tout entière dans les conditions d’égalité aussi parfaites que possible. C’est là le principe sur lequel nous devons construire le monde de demain. »

A propos de la guerre : « La guerre, en effet, n’est pas une procédure judiciaire, c’est le droit que se sont arrogés les peuples d’être juges, parties et bourreaux dans leur propre cause. Cette idée, nous devons la chasser non seulement de notre droit national, mais aussi du droit international et toute nation qui aura recours à la guerre, même si sa cause est juste, devra être considérée comme commettant un crime. »

Ouvrir la conscience humaine

Ce livre nous apporte aussi l’espoir d’un humanisme basé sur la fraternité, principe de base de la franc-maçonnerie, développé par Henri La Fontaine et son ami Paul Otlet. Tous deux tracent le chemin vers la paix universelle grâce à la connaissance accessible à tous. Il s’agit du Mundaneum, la Cité Mondiale, basée sur la connaissance et la compréhension universelle. Une vision étonnamment moderne car partiellement concrétisée actuellement par le partage universel des savoirs, rendu possible par la technologie de l’internet. Les créations d’Otlet et de La Fontaine, à savoir l’Institut International de Bibliographie – Fédération internationale de documentation, le Musée international de la Presse, le Palais Mondial, la Classification Décimale Universelle, le Répertoire Bibliographique Universel visent à rendre la connaissance accessible à tous, à élaborer une nouvelle gouvernance mondiale, non pas autoritaire comme celle des super puissances d’aujourd’hui, mais ouvrant la conscience humaine aux enjeux mondiaux.  

- Pierre Van den Dungen. Henri La Fontaine. Prix Nobel de la Paix 1913. Coll. Histoire. Ed. Samsa. 2022

La machine à penser le monde

Pour découvrir ou approfondir cette vision d’un humanisme mondialisé, le Mundaneum à Mons propose une nouvelle exposition permanente : « Mundaneum. Machine à penser le monde ». Vernissage le 27 avril 2023. Infos : www.mundaneum.org

Un livre abondamment illustré retrace cette fabuleuse aventure de Paul Otlet et d’Henri La Fontaine:

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