Les fake news servent le politique

Humeurs d'un alterpubliciste

Par | Penseur libre |
le

Visuel de l'affiche de la journée difference day à Bozar le 3 mai 2018

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Lecture 6 min.

Le 3 mai était la journée mondiale de la liberté de la presse. Bozar, l'ULB et la VUB en ont profité pour rassembler les acteurs préoccupés par l'érosion de cette liberté. Je ne vais pas vous faire un rapport de la journée mais deux faits m'ont interpellé. Le premier est le perpétuel et difficile équilibre entre règlementation et liberté. Aujourd'hui, la liberté est là, tous les citoyens sont devenus émetteurs et récepteurs, plus besoin de médiation et, nous dit un intervenant, les politiques l'ont bien compris: ils communiquent en direct via les réseaux sociaux, plus besoin de passer par ces journalistes qui intréprètent et commentent ce qu'ils disent. Vive le direct. Surviennent alors les fake news qui servent les politiques et les marketers.
Car plus le danger du fake news est brandi, plus il décédibilise les médias et justifie la légitimité du marketer et du politique à vouloir s'en passer. Et ça, ce n'est pas bon pour la démocratie. Heureusement, il y a des gens qui chassent le Fake News et l'Europe dont ont dit toujours tant de mal les soutient  dans le cadre de financement de projets innovants  à l'horizon 2020. C'est le cas de Denis Tessou du Medialab de l'Agence France Presse qui a développé InVid, un logiciel freemium que vous pouvez découvrir en cliquant ici. Il permet de vérifier l'authenticité de vidéos et photos. Il nous montre ainsi des photos de manifestations violentes qui illustrent une actualité à laquelle elles ne correspondent pas. La presse doit être rapide et réduire ses coûts: trouver des images de stock, libres de droit est une façon de faire, mais à l'heure où les images communiquent plus que les mots, cela ne sert pas la vérité. Et Denis Teyssou, appuyé par Jean-Jacques Jespers, espère que la technologie permettra de débusquer tous ces courts-circuits qui plaisent à l'actionnaire (c'est plus rentable), qui échappent au lecteur (il ne sait rien, on doit l'informer) et qui désservent la vérité, la démocratie et le quatrième pouvoir auquel les hommes politiques espèrent échapper et dont les actionnaires privés des médias se passeraient tout autant.

Le quatrième pouvoir  a besoin du soutien de ses lecteurs pour résister à ce qu'ils appelaient, hier, Commercial Correctness in the Newsroom. Or disaient-ils, hier, le marketing est entré dans la newsroom. Bénédicte Autret de chez Google était là aussi. Comme ses patrons, elle prétend que s'il n'y a pas d'info de qualité, leur moteur de recherche deviendra inutile or c'est le cœur de leur métier. Soit, j'ai beaucoup de respect pour Google et l'éthique qui a présidé à leur algorithme PageRank. Je crois aussi, comme elle le dit, que le commerce est bien distinct de l'info chez eux. En termes de publicité, elle réaffirme qu'ils ne font pas du display comme Facebook mais de la "lead generation". Maintenant, la lead genration, c'est aussi ce que Cambridge analytica a fait avec Facebook. Leurs modèles ne convergent-ils pas, finalement ? Et qui me garantit que Google restera fidèle à son éthique initiale. S'ils appartenaient à l'Unesco ou l'Unicef, je pourrais comprendre mais... L'homme politique qui entend se passer de la médiation des journalistes, n'est-il pas comme l'annoncuer lambda ? Ne rêve-t-il pas de pouvoir saisir le bon prospect au bon moment pour lui dire de voter pour lui ? Hommes politiques et savonettes, même combat ? Macron l'illustre bien, non ? Faut-il l'en blâmer ? Le marché aurait-il toujours tort. Le marché, qu'on aime ou non le mot, c'est nous tous qui le formons, nous tous qui nous laissons attirer, séduire convaincre ou non par le chaland, comme au marché sur la place du village quand on essaie de vous vendre l'éplucheur de patate qui en fait des frites sans peine, démo à l'appui.

Il est étonnant de réaliser que ce sont souvent les pouvoirs publics qui financent les vraies innovations: airbus, TGV, internet, téléphoniemobile, GPS, etc. mais ils n'ont rien lancé au niveau de la presse sur le web ? Pourquoi ? Manque d'intérêt ? Et si,  au lieu de faire leurs universités d'été et leurs grands chantiers intelectuels, s'ils faisaient un media collaboratif ouvert aux citoyens lecteurs/électeurs ? Un media porteur d'idées et de débats. Un laboratoire permanent qui s'appuierait sur les nouvelles techn,ologies et les vieilles un iversités popur ralluler les lumières?  Ne me dites pas qu'ils préfèrent leur petits monopoles sur leur compte Facebook ou Twitter ? On n'est pas sorti de l'auberge, je sais,  mais il y a de l'espoir.
Les grandes tendances qui se dessinent et qui serviront mieux la démocratie, la vérité et leurs serviteurs, les journalistes indépendants, sont les suivantes, comme le soulignait Denis Teyssou de l'AFP:

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1. Il y a aujourd'hui plus de 300 chaînes de télé qui déversent des news 24heures sur 24 et 7 jours sur 7 et qui se répartissent à 50/50 entre le privé et le public. La concurrence et la technologie qui débusque le fake font que cette tendance servira l'actu et sa vérité. Elle montre aussi le besoin viscéral des gens de savoir ce qui se passe, même si une info chasse l'autre dans ces gros robinets peu critiques parce que le scoop ne permet pas la critique. CEs chaînes renforcent le besoin d'une presse d'explication, d'analyse. Elle se développe aussi. Il faut juste espérere qu'il ne faudra pas chaque fois un Trump un Brexit pour qu'un journal comme le New York Times puisse renouer avec la croissance.
2. En termes de revenus pour la presse, 2 modeles se présentent pour deux types de média différents : les médias où on paie pour approfondir des sujets, leur connaissance et la relation avec la rdaction et sa ligne éditoriale. L'autre vise à maximiser l'audience et vendre de l'espace dans la mémoire des lescteurs/spectateurs aux annonceurs.
3. Une troisième tendance se fait jour c'est la collaboration au service de l'info entre rédaction, entre lanceurs d'alertes et journalistes, etc.
4. Enfin, il y a aussi des solutions qui se construisent pour aider la presse et les journalistes à traiter les commentaires dont leurs articles font l'objet. Une tâche qui prend beaucoup de temps mais qui faute d'être bien traitée finit par favoriser la perception de fake news et la tendance à l'im-médiation.

Cette absence de médiation plaît au politique et à l'annonceur. Les seuls à pouvoir résister, ce sont nous, les lecteurs, électeurs et consommateurs en exerçant notre pouvoir de dire NON et en allant acheter un journal parce que ce qui est gratuit a toujours un prix ! (Un journaliste exhortait le public à le faire. Mais il n'y avait aucun quotidien ou magazine disponible en sortant. Les marketers sont trop pris dans les salles de rédaction pour s'abaisser à ça, peut-être?)

Allez, bon WE et n'oubliez pas que devenir ou rester un vrai lecteur reste la meilleure alternative aux fake news.

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