Le sentier du bout du monde

Chemins de traverse

Par | Journaliste |
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A peine tracé, le sentier retrouve toujours son chemin...Photo © Marcel Leroy

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Quand le vent a soufflé si fort, voici quelques jours, un nid est tombé de la haie. Posé sur l'herbe, le nid avait été tissé avec soin. L'oiseau qui avait construit sa demeure avait utilisé toutes les ressources de son environnement. Le pourtour de cette légère demeure était tapissé de crins de cheval. Les fils blancs transformaient le nid en un chef-d'oeuvre d'art de vivre. Que font les oiseaux quand leur maison s'envole? Expriment-ils ce qu'ils ressentent, dans les cris bruissant dans la forêt? Je pense à ce scientifique du zoo d'Anvers qui sifflait comme les aigles. Il parlait aux aigles. Ils étaient tristes quand il quittait leur volière. Ils criaient.

Dans le bois, un sentier à peine tracé retrouverait toujours sa route. Elle est la mémoire d'un itinéraire écrit par des passants depuis, qui sait, peut-être plus d'une centaine d'années. Inscrit à l'atlas des chemins, sa survie dépend de ses usagers. Si tu délaisses un sentier, les ronces le recouvriront, puis viendront les euphorbes et les digitales, les fougères et les clés de Saint-Pierre. Au fil des saisons il s'effacera, le sentier. Viendra plus tard la disparition officielle, l'exclusion du registre du cadastre. Est-ce bien là qu'on recense les sentiers? Il faut les défendre. Reviennent les propos d'un villageois chevalier des sentiers. Il avait écrit leurs histoires. Celles du temps où les voitures étaient moins nombreuses sur la grand-route. Où les gens allaient d'une ferme à l'autre en traversant le bois. 

Au détour du sentier, hier, le chien s'est figé. Il a levé la tête et humé l'air du roncier. Le silence était tombé comme un rideau de théâtre sur une scène de toujours. Les oiseaux se sont tus. Dans un grondement, une masse noire s'est éloignée. Un sanglier. Dix mètres plus loin, de l'autre côté du fourré hérissé de ronces, un mouvement agitait le vert profond. Cinq, six, sept marcassins sont passés. Un peu en retrait, la maman veillait. Elle a regardé le chien et l'humain, fixement. Sans bouger. Le chien et le marcheur ont rebroussé chemin.   Les oiseaux se sont remis à chanter. Le chien n'avait pas aboyé.  Il n'y avait pas eu de peur. Juste la croisée de destinées proches, dans le respect des chemins. Pourquoi raconter ça? Sais pas. Sais pas. Peut-être parce que dans le mot déconfinement on retrouve ce beau mot, les confins. Ce lieu magique où toutes les frontières, toutes les limites,toutes les différences, finissent par se confondre. Au bout de tous nos petits mondes.  

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