La Saint-Valentin à risque

Confidences du chauffeur du Ministre

Par | Penseur libre |
le
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Lecture 3 min.

Qui a dit que « l’oisiveté est la mère des vices » ? Mon patron l’ex-futur-Ministre des Affaires Stratégiques et Tactiques m’a dit le contraire. Je ne suis pas sûr d’avoir compris, mais lui a dit : « l’oisiveté est la mère de la créativité ». Il est vrai qu’en ce moment, avec la démission du gouvernement, et l’ambiance incertaine d’entre-deux-saisons, mon Ministre a l’imagination fertile, et des gestes de bienveillance débordants.

C’est sans doute pourquoi notre Ministre nous a invités en sa résidence, nous les membres de son ex-futur- cabinet. Motif ? La Saint-Valentin ! Et en hommage spécial à sa charmante épouse. Surprise en arrivant à la résidence ministérielle ! Les colonnes, les murs, le plafond, le parterre, tout sous la paillotte, était tapissé de petits amours de cœurs imprimés. Cœurs transpercés. Cœurs rouge-noir à la Saint-Valentin. Cœurs traversés de poèmes vibrants, avec à chaque vers le prénom de l’épouse, de madame-la-muse. Et en sourdine, propagés à travers tous les recoins de la résidence, des frémissements d’une rumba suave, romantique, soukoussée  par des chansons expressément dédicacées ; du genre :

« Bolingo lokola likie

    Simbaka yango makasi

    Soki ekweyi yango epasuki

    Mawa na yo otikali »

(« L’amour comme l’œuf

      Tiens l’œuf avec précaution

      S’il tombe, il s’écrase

      Malheur à toi l’amoureux »).

L’épouse en était émue jusqu’aux larmes, se félicitant sans doute au fond d’elle que ça dure, ce chômage si inspiré de son mari de Ministre en oisiveté forcée. La journée s’est passée ainsi dans une effervescence toute en cuite. Puis le feu d’artifice et le bouquet de la fête : des cadeaux des invités; et surtout des fleurs, des fleurs…

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… Au sortir de la fête, je me suis promis, dès mon retour chez moi, d’honorer moi aussi ma propre épouse, chair de ma chair, mon amour d’œuf-talisman comme dans la chanson. Je suis donc passé d’abord chez le jardinier du quartier et lui ai commandé le plus beau bouquet de fleurs de sa collection. Le jardinier en était d’autant plus surpris qu’habituellement les commandes de fleurs dans le quartier, et à cette heure tardive, concernaient des bouquets pour deuils !

Il était en effet assez tard lorsque j’ai frappé à notre porte. Ma femme m’a accueilli entre deux bâillements. Je me suis empressé de lui offrir avec effusion mon cadeau, en claironnant : « ma chérie, voici les fleurs que t’offre la Saint-Valentin ». Ma femme a écarquillé les yeux ; elle a rétorqué : « la… Sainte-quoi ? Rentre chez ta … sainte-là, et ramène-lui son cadeau empoisonné de rivale, des fleurs de cimetière ! »…

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