Philanthropie 2023 : des solidarités multiples

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Par | Journaliste |
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La reine Mathilde encourage la philanthropie comme moyen d’améliorer notre « vivre ensemble » en société. Photo © Gabrielle Lefèvre

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Le mot philanthropie a été remis au goût du jour et de l’urgence sociale et climatique, ce 27 avril 2023, grâce à l’apport des nombreuses fondations philanthropiques rassemblées par la Fondation Roi Baudouin.

L’événement « Be Philanthropy » a été inauguré par la reine Mathilde qui a souligné les notions de solidarité, de partage et le désir d’empathie qui animent tant de gens face aux crises comme celles du Covid, la guerre en Ukraine, les catastrophes naturelles qui ont dévasté des zones entières d’habitations, chez nous, en Turquie et Syrie… Il y a de multiples moyens de construire une société plus inclusive, dit-elle, évoquant l’éducation pour nos enfants, l’argent et le temps à investir auprès des jeunes entrepreneurs, des personnes en difficulté, dans le domaine social mais aussi écologique. La reine souligna aussi la pauvreté croissante, la qualité de vie des personnes âgées et autres défis posés à l’amélioration de notre vie en société grâce à l’impact des dons et actions sur le terrain ; tous ces projets concrets qui améliorent le « vivre ensemble ».

De cette journée d’analyses et de réflexions sur les divers thèmes concernant la philanthropie moderne, retenons le caractère exemplaire du partenariat existant en Belgique entre les pouvoirs publics et la vie associative représentée ici par les fondations philanthropiques.

Renforcer l’État providence

Cela fut souligné par Pierre Wunsch, président du bureau des gouverneurs de la Fondation Roi Baudouin, pour qui la philanthropie est un laboratoire d’innovations sociales et de solutions inclusives ». Cela fut concrétisé dans le discours du Vice-Premier et ministre fédéral des Finances Vincent Van Peteghem qui n’hésita pas à dire que politique et philanthropie avancent « épaule contre épaule » dans le cadre d’un Etat providence efficace. Ce système de solidarité sociale est d’ailleurs « un de plus grands actes philanthropiques de l’histoire », insiste-t-il. Car les revenus des impôts sont utilisés aussi pour « aider les plus vulnérables de la société », un « choix qui permet à chaque Belge de bénéficier de la solidarité, à savoir « partager le gâteau avec ceux qui en ont le plus besoin ». Le ministre n’élude pas la question délicate des critiques et pressions sur la solidarité par ceux parmi les « riches » qui estiment en porter le poids. De tels doutes mettent à mal le système, constate le ministre qui réaffirme qu’il faut « renforcer la solidarité, garantir aux gens que le système social est utile et qu’il faut y contribuer. ».

Pour renforcer notre système de soins de santé, pour assurer les pensions dans les décennies à venir, les pouvoirs publics ont besoin des solidarités multiples. « Il faut une société civile forte et diversifiée pour assurer une démocratie saine », dit le ministre qui se félicite notamment du rôle de la Loterie Nationale à laquelle de très nombreuses associations font appel afin de soutenir leurs actions sociétales. Quant au ministère des Finances, il s’inspire du baromètre de la philanthropie, véritable veille des besoins sociétaux et il pourrait augmenter les incitants financiers selon les besoins. En coulisse, il se murmurait que la déductibilité fiscale des dons pourrait augmenter dans les prochaines années, et l’on sait que c’est un excellent incitant pour les donateurs.

Aider les innovations performantes

Cette vision encourageante est partagée par le secrétaire d’État pour la Relance, Thomas Dermine, qui note lui aussi que la philanthropie peut rendre l’État plus efficace et s’assurer que tous bénéficient des services et des droits comme l’éducation, par exemple. Elle peut répondre aux failles et aux échecs du politique dont le rôle est de bâtir des solutions, élaborer des lois, expérimenter de nouveaux programmes, mener des test innovants grâce à des actions de philanthropes.

Il explique que dans notre pays, 99 % des budgets des ministères sont préalloués, la marge de manœuvre pour innover est donc très réduite ce qui peut freiner les changements puisque les budgets sont fermés. Par contre, créer de nouveaux partenariats, européens par exemple, pour le changement et l’innovation, élaborer de nouveaux contrats entre privé et public pour la lutte contre la pauvreté, par le biais d’appels à projets, pour de l’expérimentation sociale, soutenir même au niveau national des projets qui montrent leur efficacité, voilà qui permet des investissements publics possibles et sûrs.

Dans d’autres pays, comme le Portugal par exemple, existent des émulations de ce genre entre responsables politiques et monde associatif, ce qui permet de mettre au point un agenda national d’innovation sociale.

Freins règlementaires et bancaires

La plupart du temps, les associations sont confrontées au morcellement des pouvoirs et compétences politiques, particulièrement en Belgique, et doivent s’adresser aux divers niveaux de pouvoir, ce qui rend la tâche plus complexe. Et si des entreprises commerciales ou industrielles mènent des actions philanthropiques, il s’agit de la part des pouvoirs publics d’être vigilants afin d’éviter les conflits d’intérêts, la neutralité politique, tout en favorisant ce genre d’actions auxquelles les entreprises apportent leurs moyens, leur efficacité et leur expertise.

Concilier règles, lois et innovations sociales est encore plus complexe au niveau européen où les règlementations sont parfois opaques.

De plus, les collaborations internationales entre associations philantropiques et avec les bénéficiaires situés un peu partout dans le monde sont rendues très difficiles par des règlementations bancaires prétenduement destinées à empêcher les fraudes, évasions fiscales ou financements mafieux mais parfois aussi instrumentalisées afin de pénaliser des actions en faveur d’associations qui ne répondent pas aux critères du « politiquement correct » de certains pays occidentaux. De plus, en cette époque de révélations incessantes sur des corruptions de mandataires politiques par des lobbies de toutes sortes, la rigueur est plus que jamais de mise dans les instances européennes et internationales, et donc les conditions, les contrôles, les restrictions freinent énormément les actions philanthropiques internationales.

Au cours de ces échanges, la directrice de la Fondation Roi Baudouin, Françoise Pissart, a rappellé que le rôle de la FRB consiste à mettre ensemble des citoyens, des associations, des pouvoirs publics, pour aider, sur le temps long, des causes sociales, faire émerger des solutions, découvrir des nouveaux terrains d’action.

Cette journée fut en effet une bien belle expérience de citoyenneté active, renforçant la demande actuelle de démocratie plus participative. Et les représentants politiques y ont répondu très positivement. Pour Brieuc Van Damme, CEO de la FRB, « la philanthropie est plus nécessaire que jamais », dans un esprit d’universalité, elle incarne une « solidarité sans frontière ».

https://kbs-frb.be/fr/be-philanthropy-2023-1

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