La RTBF doit arrêter de copier les méthodes du privé

ConsoLoisirs

Par | Journaliste |
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Le 17 octobre 2017, au Parlement, trois des représentants du collectif "La RTBF nous appartient », Frédéric Gaston, Alexis de Boe et Mathieu Richard (à droite de la photo, du fond vers l’avant plan), ont présenté les cinq revendications de leur pétition qui a déjà recueilli plus d’un millier de signatures.

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Près de deux heures d’audition au Parlement. Le lendemain, un communiqué de BELGA et des articles dans Le Soir, L’Avenir, Télépro, etc. Un début de reconnaissance pour un groupe de pression nouveau qui se mobilise afin que le service public revienne à ses missions fondamentales.

SOMMAIRE

1. La RTBF doit arrêter de copier les méthodes du privé
2. Tintin et Halloween
3. L’audioguide dans ou hors du prix d’entrée?
4. Et de deux!
5. Merci à deux journalistes
6. Mauvaises expériences à La Boverie (Liège)
7. Les usagers des médias intéressent-ils si peu le CSA?
8. Un «caca nerveux» des Musées Royaux des Beaux-Arts de Belgique
9. Olivier Maroy, Philippe Manoeuvre… et Stéphane Bern

1. La RTBF doit arrêter de copier les méthodes du privé

Le nouveau contrat de gestion (en général d’une durée de cinq ans) devait commencer à s’appliquer le 1er janvier 2018. Ce ne sera sans doute pas le cas et son démarrage sera sans doute retardé d’un an à cause des rebondissements politiques francophones d’avant été 2017 qui ont interrompu sa préparation pendant plusieurs mois.

Ce n’est pas plus mal car si les partis de la majorité de la Fédération Wallonie-Bruxelles le veulent (PS/CDH), ils pourraient, pour une fois, prendre le temps de réfléchir davantage et préparer un indispensable grand chambardement.
Le RTBF en a cruellement besoin, tellement elle est devenue antipopulaire, et surtout auprès du vaste public qui la chérissait, mais qui, aujourd’hui, considère qu’elle ne donne plus la priorité aux missions spécifiques pour lesquelles l’argent public (dont la dotation) couvre près de 80% de ses rentrées. Bref, c’est l’occasion unique, si le pouvoir politique le souhaite, de faire évoluer la composition du conseil d’administration en permettant enfin à des représentants de la société civile d’y accéder, de diminuer les salaires plus élevés de la hiérarchie (davantage que celui attribué à notre Premier Ministre Michel!), de trouver des financements alternatifs en cas de diminution de la présence publicitaire tant honnie par le public, de redonner leur place au prime time à des programmes réguliers et attractifs consacrés au social, au culturel et à l’éducation permanente, de ne plus se limiter uniquement à la présence des grands sports de compétition, etc.

La commission chargée au Parlement de réfléchir à l’avenir de la RTBF a donc enfin entamé la poursuite de ses travaux, le 17 octobre dernier, par l’audition pendant près de deux heures du collectif «La RTBF nous appartient».
Devant les parlementaires, trois de ses membres (Frédéric Gaston, Alexis de Boe et Mathieu Richard) ont présenté les cinq revendications de leur pétition qui a déjà recueilli plus d’un millier de signatures (bientôt, la vôtre, si ce n’est déjà fait).

Intéressé par l’évolution depuis plus de trente ans de la RTBF et ayant publié quatre ouvrages à ce sujet, je me fis un devoir et une joie d’assister à cet événement (enfin, de jeunes citoyens qui se préoccupent de ce dossier et proposent des solutions d’avenir à la crise actuelle). C’en fut un assurément et notamment Le Soir y consacra dès le lendemain un compte-rendu de Jean-François Munster sur cinq colonnes intitulé: «Un collectif d’usagers auditionné au Parlement: La RTBF doit arrêter de copier les méthodes du privé».

Je ne vous livrerai pas de suite mes impressions car tout va si vite quand on assiste à pareil échange d’idées. Je préfère attendre le compte-rendu détaillé de cette séance qui sera publié sur le site du Parlement.

C’est la loi du genre: le collectif a dû, avant les questions des parlementaires, résumer ses options en 20 minutes. Heureusement, «La RTBF nous appartient» avait couché sur le papier de façon plus détaillée ses revendications et les différents partis démocratiques ont reçu ce dossier dense de 29 pages.
L’agence BELGA a également publié un long communiqué qui détaille l’audition de «La RTBF nous appartient». En voici quelques extraits:

(…) Le collectif plaide pour une réduction sensible de la publicité à la RTBF – notamment par la suppression de toute publicité les mercredis, jour où les enfants sont davantage susceptibles de regarder le petit écran – ainsi que la fin totale du placement de produits.

(…) Selon l'association, la chaîne publique, soucieuse de faire de l'audience, a orienté ces dernières années sa programmation vers le simple divertissement, reléguant souvent la culture et les programmes éducatifs tard le soir, ou sur la Trois.

(…) Selon ce collectif, la RTBF devrait faire davantage d'éducation permanente pour promouvoir le vivre-ensemble, s'intéresser davantage à la transition écologique, offrir une plus grande diversité dans la couverture des sports – plutôt que de se focaliser sur le football –, s'intéresser plus aussi à l'Europe, diffuser plus de culture en prime time, et mettre sur pied une émission sur la parentalité, comme le réclame la Ligue des familles depuis longtemps.

(…) Autre point de focalisation du collectif: la gouvernance de la RTBF et son conseil d'administration qui devrait, selon lui, être ouvert à la société civile, et publier ses décisions.

(…) Le collectif voudrait que le futur contrat de gestion de la radio-télévision publique restaure un service efficace de médiation entre la RTBF et ses utilisateurs: «Les émissions de médiation (en télévision) ont été vidées de leur sens. Et en radio, il n'y a tout simplement plus rien!». Selon le collectif, il conviendrait en conséquence d'externaliser carrément la médiation de la RTBF pour la confier à des acteurs professionnels de la médiation.

Ce communiqué a notamment inspiré Télépro ainsi que «l’Avenir» et «7 sur 7».

2. Tintin et Halloween

Comment après coup se procurer le supplément gratuit de 48 pages «Regards sur les musées» inséré dans Le Soir du 28 octobre 2017?
Il s’agit d’un document précieux qui vous propose plein d’articles de fond sur la vie muséale mais aussi le guide détaillé de toutes les gratuités des musées en Belgique (le 1er mercredi du mois, le dernier mercredi du mois, le premier dimanche du mois, tous les jours, etc.), les lieux où va se déroule la fête de la gratuité du 1er dimanche, mois après mois, pendant un an, de quoi vous organiser votre tour de Belgique culturel, etc.
Des exemplaires de «Regards sur les musées» vous attendent dans les bibliothèques publiques, aux bureaux de l’asbl Smart et aux beaux de «Arts&Publics» situés à Bruxelles, avenue Louise (uniquement sur rendez-vous à prendre par e-mail: info@artsetpublics.be).

N’oubliez pas que le dimanche 5 novembre, ce sont plus de 150 musées qui sont gratuits à Bruxelles et en Wallonie. Toutes les infos: www.artsetpublics.be

Parmi ceux-ci, certains vous ouvrent simplement leurs portes, d’autres font un grand effort, et parfois même chaque mois, pour vous offrir de jolies surprises.
Le plus grand musée privé de Wallonie, le Musée Hergé (situé proche de la gare de Louvain-la-Neuve), est de ceux-là. Son accueil mérite régulièrement nos louanges et tout particulièrement ce mois-ci où il a concocté une fête Halloween.

Chaque mois, un des 150 musées organise sa Fête de la gratuité «du premier dimanche».
Ce dimanche 5 novembre de 10H à 18H, elle aura lieu à Boussu, au MAC’s/CID du Grand-Hornu. Plus d’infos: www.mac-s.be
Un programme spécial pour petits et grands vous a été concocté pour l’occasion:

  • 10H00: Balade botanique sur le terril,
  • 11H00: Visite guidée de l’exposition «Ritournelle» d’Anne-Marie Schneider,
  • 11H00: Visite guidée jeune public de l’exposition «Ritournelle»,
  • 14H00: Visite guidée de l’exposition «Ritournelle»,
  • 14H00: Atelier Baz’art autour du dessin en compagnie d’une illustratrice,
  • 15H30: Visite guidée du site historique du Grand-Hornu,
  • 16H30: Visite guidée de l’exposition de design Patrick Marchal.

Et le mois prochain? La fête de la «gratuité du premier dimanche» du 3 décembre 2017 se déroulera à Liège, avec des activités particulières à l’Archéoforum (de 13H à 17H, sous la place St Lambert) ainsi qu’au Musée de la Vie Wallonne (de 09H30 à 18H00, Cour des Mineurs).
www.archeoforumdeliege.be et www.viewallonne.be

Chaque mois, une newsletter mensuelle spécifique vous met au courant des différentes nouveautés de cette gratuité du premier dimanche. Inscription: info@artsetpublics.be

3. L’audioguide dans ou hors du prix d’entrée?

Le Musée des Instruments de musique dépend des Musées Royaux d’Art et d’Histoire (MRAH) dont la Directrice ad interim est Alexandra De Poorter.

Après avoir publié ma carte blanche dans La Libre, j’ai écrit à la direction des MRAH afin de pouvoir la rencontrer pour tenter de faire évoluer la situation dans l’intérêt des visiteurs.
C’est Samuel Mudiayi Bukassa du Secrétariat de la Direction qui m’a répondu pour Madame Alexandra De Poorter, Directrice générale a.i.:

«Concernant votre demande de rencontre (…), nous nous étonnons que celle-ci se fasse peu pertinemment à postériori de la publication de votre texte.

Nous accusons toutefois bonne réception de votre ressenti et vous prions de croire en l’assurance de notre sincère considération.

Notre nouveau programme d’audioguides sera rendu opérationnel dès que possible. Nous devons en effet tenir compte de nombreux impératifs administratifs et financiers. Ces contraintes sont malheureusement bien souvent difficiles à concevoir et à accepter pour qui ne travaille pas dans le secteur public.

Quant au tarif demandé pour les audioguides, il est vrai que jusqu’à présent, il n’existait aucune distinction de tarification entre une visite avec ou sans audioguide. A titre comparatif, il suffit de traverser la rue pour constater qu’aux Musées royaux des Beaux-arts le prix d’un audioguide s’élève à 4 euros. Séparer les tarifs (entrée et audioguide) permet d’établir des statistiques correctes et de mieux contrôler les revenus. Sachez que nous ne cessons d’œuvrer afin d’améliorer de manière significative l’expérience que nous souhaitons offrir à nos visiteurs.

Saluant ainsi l’intérêt tout particulier que vous semblez porter envers nos activités et souhaitant tout comme vous encourager le plus grand nombre à prendre part à la vie des musées, recevez, Cher Monsieur, nos meilleures salutations».

J’ai envoyé la réponse suivante:

«Cher Monsieur Mudiayi Bukassa,

Je constate que votre réponse pour le moins diplomatique ne me permet pas de rencontrer votre direction.
Il est donc bien difficile dans les institutions culturelles fédérales d’accorder du temps à un échange entre quatre (ou plus) yeux avec un expert des usagers. Je n’avais sans doute pas eu tort de choisir d’intituler mon livre paru aux éditions Couleur Livres plutôt «Les musées aiment-ils le public?» que, d’une façon plus traditionnelle, «Le public aime-t-il les musées?».

Tout bien réfléchi, c’est sans doute mieux ainsi.
Les paroles s’envolent à l’inverse des écrits. Je me permettrai donc de poser quelques questions par écrit par votre intermédiaire à la Directrice ad interim des MRAH, Madame Alexandra De Poorter.

1: D’abord, une simple demande d’information. Plusieurs de mes lecteurs me demandent pourquoi, dans son texte d’annonce de l’absence de l’audioguide, le MIM établi à Bruxelles utilise l’ordre suivant des langues:
- En un, l’anglais,
- En deux, le néerlandais,
- En trois, le français.

2: Régulièrement, je vais au MIM pour lire les nouveaux témoignages de son livre d’or exposé à côté du vestiaire, au rez-de-chaussée.
L’un d’entre eux m’a particulièrement interpellé lors de ma visite de ce 21 octobre 2017: «Superbe musée, dommage que nous n’ayons pu entendre aucun SON (audiophone en panne?)». Les visiteurs qui l’ont écrit signalent qu’ils sont «venus de France».

Ce texte laisse entendre par le point d’interrogation de son «audiophone en panne?» que ses auteurs n’ont pas été mis au courant avant leur visite des raisons de l’absence d’audioguide (sinon ils ne poseraient pas cette question à l’issue de leur visite). Je sais que tant sur la vitrine (perdu parmi tant d’autres affichages) que sur le comptoir (mais il y a parfois foule devant le comptoir et on peut ne pas alors voir tout ce qui s’y trouve) vous avez affiché deux petites feuilles indiquant l’absence momentanée d’audioguides, mais est-ce suffisant?

Puis-je savoir si votre personnel, au moment où le visiteur achète son ticket, avertit de façon systématique celui-ci de l’absence de l’audioguide?

3: Me confirmez-vous que, comme vous l’avez déclaré à la presse, lorsque la situation se sera régularisée (probablement en avril 2018), l’entrée au MIM passera de 8 euros (audioguide inclus), prix ayant cours jusqu’au 5 septembre 2017, à 10 euros + 2 euros (pour l’audioguide désormais facultatif)?
Comme l’audioguide est indispensable à la visite, l’augmentation globale est donc bel et bien, en quelques mois, de 4 euros (soit 1/3 du prix en plus)?

4: Vous aurez constaté que je m’abstiens de critiquer cette augmentation fulgurante du prix de votre splendide musée car cette évolution, bien qu’elle pose un vrai problème de démocratisation de la culture, n’est pas pour autant de l’ordre de la tromperie du public et, d’autre part, on connaît aussi les difficultés financières de nos musées fédéraux.

Par contre, je pense qu’il y a tromperie ailleurs dans vos projets et j’espère que vous pourrez évoluer sur ce point dans votre décision.

Personnellement, je suis pour la séparation nette entre le prix du ticket et la location d’un audioguide, dans la majorité des cas, à savoir lorsque celui-ci est utile mais accessoire à la visite.

Pratiquer un prix unique pour l’entrée et l’audioguide peut même constituer un cas de «vente forcée», comme l’on dit dans les supermarchés, à éviter à tout prix: emballer deux produits différents ensemble pour un prix unique devrait s’assortir de la possibilité de les acheter séparément…

Ainsi, pour être clair dans cette explication, je tiens à vous signaler que je conteste les Musées Royaux des Beaux-Arts de Belgique lorsqu’ils prévoient pour certaines expositions temporaires un prix d’entrée avec possibilité d’utiliser gratuitement l’audioguide. Une partie significative des visiteurs n’aime pas les audioguides et sera donc forcée de payer pour ce service qu’elle n’utilisera pas. Dans certains cas, ce prix «couplé» peut même masquer, voir tenter d’adoucir une augmentation exponentielle du prix du ticket.

Au contraire, BOZAR propose pour ses expositions temporaires la séparation du prix du ticket et de la location de l’audioguide.

Mais votre cas est différent, exceptionnel, et va à l’encontre de cette «doctrine générale».
Parfois, l’audioguide est indispensable à la découverte d’un musée car celui-ci a été conçu pour être obligatoirement visité avec pareil accompagnement technique.
C’est également le cas du Musée Hergé de Louvain-la-Neuve (le prix de l’entrée avec l’audioguide gratuit est fixé à 9,50 euros: http://www.museeherge.com/fr/visite/infos).

Dans ces cas-là, il me semble qu’il y a tromperie si on agit autrement. Car ce serait laisser entrer dans le musée des visiteurs sans audioguide alors que l’institution muséale a été conçue pour être découverte avec, et la visite ne peut être qu’insatisfaisante pour la très grande majorité de ceux-ci. Ce serait piéger vos visiteurs.

Dès lors je vous demande, plusieurs mois avant le démarrage de votre nouvelle formule, de faire évoluer votre projet de tarification et de ne pas séparer le prix du ticket et celui de l’audioguide (de pratiquer donc l’entrée avec audioguide à, hélas, 12 euros).

5: À Bruxelles, plusieurs musées fédéraux maltraitent depuis des années le public, le plus souvent pour des raisons économiques, à cause d’une règlementation inappropriée ou par un excès de bureaucratie interne, parfois aussi en raison de guerres d’influences ou à cause de nominations partisanes. Je cite plusieurs exemples dans ma carte blanche publiée dans La Libre, le 12 septembre 2017: http://www.lalibre.be/debats/opinions/le-mim-a-retire-ses-audioguides-et-le-respect-du-visiteur-opinion-59b6e94dcd703b659246c149
Pour faire évoluer sensiblement la situation, il faut donc notamment donner plus de pouvoir au public. Nous demandons en priorité aux parlementaires et ministres compétents:

  • A: La création d’un site internet spécifique où se retrouveraient les «livres d’or» de tous musées fédéraux et qui seraient fortement et dans la durée promus par chacune des institutions concernées
  • B: L’organisation dans chaque musée au moins une fois par an d’une rencontre, gratuite et fortement médiatisée, destinée à tout le public sur le fonctionnement de l’institution et les droits de ses usagers. Tous les membres de la direction doivent y participer.
  • C: La création rapide d’un Code de bonne conduite en faveur des usagers commun à tous les musées fédéraux.

Personnellement, je pense que ce sont trois propositions qui se complètent, dont les résultats changeraient quelque peu les rapports de force sur le long terme,et que leur mise en place serait d’un coût très limité.

Partagez-vous cet avis?

6: Cette sixième et dernière question n’en est pas une et je ne cherche pas à recevoir une réponse, l’opposition qui nous sépare étant trop frontale. Bien entendu, vos commentaires peuvent être instructifs.

Je tiens à vous signaler que, d’un point de vue usager, le fait que depuis le 21 août 2017, le MIM ait gardé sa tarification initiale alors qu’il enlevait un service essentiel à une visite normale s’apparente pour moi, même si le public en est averti, à une forme de vol.
Dans ma carte blanche publiée dans La Libre, je donne un exemple qui montre qu’en France, dans un cas proche, un musées a diminué d’autant son prix d’entrée.

La meilleure solution qui aurait honoré votre institution et nos autorités fédérales aurait été de ne pas piéger vos visiteurs (les réclamations de ceux-ci dans le livre d’or sont très nombreuses, et un témoignage en vaut cent autres, dit-on dans ce cas-là) en fermant temporairement le musée, ce qui, par ailleurs, aurait probablement poussé votre administration à accélérer encore davantage sa réouverture dans des conditions qui respectent le public. J’espère que vous pourrez faire découvrir cette réflexion à votre ministre de tutelle qui a toute sa responsabilité dans la continuation de l’utilisation de la tarification complète dans la situation actuelle.

Dans l’attente de lire vos réponses détaillées, je vous prie de recevoir réciproquement mes meilleures salutations.

4. Et de deux!

Annoncer la gratuité du premier dimanche par un panneau placé sur le trottoir à proximité de l’entrée du musée qui la pratique peut faire découvrir cet avantage aux passants. Un moyen quasi gratuit pour trouver un nouveau public, lui offrir une première sensibilisation.

Consoloisirs a réussi à convaincre de ce fait le musée BELvue et nous vous en parlions ici le mois dernier (article titré «Un résultat triomphal»).

J’essaie d’essaimer cette façon d’agir.
J’ai donc pris mon bâton de pèlerin et ai proposé au Musée Royal de Mariemont de faire de même, par ce courriel adressé le 20 octobre 2017:

«Bonjour, je cite votre musée dans le deuxième paragraphe du point 5
de ma newsletter d’octobre 2017 qui est disponible ici sur le site «Entre les lignes»:
Pourriez-vous réagir? Je publierai votre réponse dans ma prochaine newsletter. Merci à vous».

Le 25 octobre 2017, j’ai reçu la réponse de Marie-Aude Laoureux (Service pédagogique du Musée royal de Mariemont):

«Bonjour Monsieur Hennebert,
Très bonne idée, nous allons placer l'info aux valves à l'entrée du Domaine.
Bien cordialement».

Consacrez donc un de vos douze «premiers dimanches du mois» par an à découvrir ce musée et son grand parc: www.musee-mariemont.be

5. Merci à deux journalistes

C’est relativement rare que des journaux investiguent de façon désintéressée sur le monde des médias. Il est d’autant plus réjouissant de découvrir la parution en moins de 24 heures des deux articles suivants.

- 1: Le 28 octobre 2017, Marie-Cécile Royen a publié un article de trois pages dans Le Vif (pages 110 à 113) qui démontre comment Nethys où «règne sans partage Stéphane Moreau» fait pression sur le journal L’Avenir: «pressions rédactionnelles, préparation d’un plan de restructuration, liste noire, …»:
http://www.levif.be/actualite/belgique/le-journal-l-avenir-propriete-de-nethys-est-sous-pression/article-normal-744681.html

- 2: Le 29 octobre 2017, Jean-François Munster propose sur une page entière du Soir (page 49) une présentation détaillée de «Spott», l’application qui dope le placement de produit. Après avoir séduit RTL, elle débarque à la RTBF:
http://plus.lesoir.be/121587/article/2017-10-27/spott-lappli-pour-faire-comme-la-tele

6. Mauvaises expériences à La Boverie (Liège)

Le Musée d’Art Moderne et d’Art Contemporain de Liège (MAMAC) est devenu récemment La Boverie.

Le vendredi 27 octobre 2017, on a visité à deux son fond permanent, de 16H30 à 17H30. Nous n’y croiserons aucun autre visiteur.

Ce fait indiqué sur mon facebook attire les réflexions suivantes:

  • «Ce musée a été conçu au détriment des collections permanentes tant pour le nombre et la sélection des œuvres que pour leur mise en scène…»;
  • «Les gardiens sont sympas;-) et bien conscients de cette triste réalité ! La mise en place est pathétique»;
  • «Je n'y avais pas croisé grand monde non plus. L'éclairage est... abominable soit dit en passant…».

La Boverie symbolise l’évolution de la prédominance des expositions temporaires sur la présentation du fond permanent.
Certaines institutions seraient même prêtes à ranger leur patrimoine dans leurs réserves loin des regards du public pour favoriser les grandes expositions qui attirent plus souvent le public, les rentrées financières, les sponsors et les médias.
Ainsi, dans le musée liégeois, la majorité des locaux spacieux du rez-de-chaussée deviennent les écrins spectaculaires de ces expositions événementielles tandis que la collection doit trouver refuge essentiellement au sous-sol, dans des locaux étroits, bas de plafonds, souvent mal éclairés.

La situation est d’autant plus problématique que des chefs d’oeuvres naguère exposés avec fastes dans d’autres musées liégeois ont été rapatriés ici. On les y retrouve, le panache en moins: par exemple, le portrait de Bonaparte d’Ingres retiré du Grand Curtius ou La famille Soler de Picasso qui a notamment séjourné au BAL (Beaux-Arts Liège).

Le personnel présent lors de notre visite nous a signifié qu’il était interdit de photographier (même sans flash). Il existe peut-être des restrictions pour l’une ou l’autre peinture mais ceci ne devrait pas empêcher les visiteurs de photographier la majorité des autres oeuvres, comme cela se passe dans de nombreux autres musées.
Ici, on est même en retrait par rapport à ce qui se passait dans le même bâtiment alors dénommé MAMAC, il y a quelques années (lire le dernier paragraphe intitulé «Interdit - ou pas - de photographier»).

Enfin, comme beaucoup d’oeuvres d’autres musées Liégeois ont été rapatriées ici, La Boverie doit faire un choix draconien dans ce qu’elle sélectionne. Elle change régulièrement son accrochage pour que des toiles maîtresses ne stationnent pas trop longtemps dans les réserves. Ceci entraîne la déception de visiteurs qui viennent pour découvrir une oeuvre précise alors qu’elle n’est pas exposée à ce moment-là. À l’accueil du musée, il ne vous est pas indiqué ce qui est exposé, ou pas. Vous payez donc votre ticket comme si vous achetiez un chat dans un sac. Or, de nos jours, grâce à internet et aux ordinateurs, pareil problème pourrait être facilement résolu si les directions des musées respectaient davantage leurs usagers.

Justement, sur cette thématique, j’écrivais ceci dans mon livre «Les musées aiment-ils le public?»:

«(…) Le Musée d’Art Moderne et d’Art Contemporain (MAMAC) situé dans le Parc de la Boverie à Liège détient neuf toiles de première importance acquise à la vente de Lucerne en 1939 dont une œuvre majeure de Picasso, La famille Soler (1903), qui fut notamment présentée à l’exposition Picasso et les Maîtres du 8 octobre 2008 au 2 février 2009 aux Galeries Nationales du Grand Palais à Paris.

Cette peinture, le «clou» du musée, et deux autres, n’étaient pas exposées lors de ma visite du 25 avril 1998. J’envoie la lettre suivante, quatre jours plus tard, à sa conservatrice, Françoise Safin-Crahay : «...C’est votre dépliant qui m’a donné envie de découvrir votre musée. Il reproduit notamment trois œuvres célèbres de votre collection permanente : «Les masques et la mort» de James Ensor, «la famille Soler» de Pablo Picasso et «Le sorcier d’Hiva-Oa» de Paul Gauguin. Hélas, ces toiles n’étaient pas exposées. Je peux comprendre que des peintures ne soient pas présentées temporairement. Par contre, je trouve tout-à-fait incorrect qu’un avis informant le visiteur de ce fait ne lui soit pas accessible avant qu’il ne paie son entrée (50 FB). Voici mes deux questions. Pourriez-vous m’indiquer s’il existe une pratique déontologique qui va dans ce sens, dans votre profession? Pourriez-vous prendre l’initiative de mettre en place ce type d’information pour vos visiteurs? Quand?».

Cette lettre et son premier rappel, un mois plus tard, restèrent sans réponse. Le 27 juin, je dus donc envoyer un second rappel en recommandé auquel me répondit la conservatrice, le 16 juillet : «Notre dépliant de présentation est destiné à donner une idée de nos collections mais pas nécessairement de ce qui est exposé. En effet, notre musée conserve plus de 1.000 œuvres dont seulement 100 à 200 sont exposées. Un roulement est effectué dans l’accrochage afin qu’un maximum d’œuvres soient montrées sur une année. De plus, certaines œuvres sont prêtées à des expositions temporaires, ou parties en restauration, ou sont remises en réserve pour faire place à d’autres. Je pense que c’est le cas de tous les musées et je n’ai pas connaissance de règles déontologiques à ce sujet. Je retiens votre idée de signaler l’absence d’œuvres (du moins celles qui sont dans le dépliant (NDLR: elles sont au nombre de 22), au comptoir d’entrée, afin d’éviter toute surprise au visiteur».
Cinq mois plus tard, j’effectue une visite de contrôle décevante. Je réécris donc à la direction du MAMAC : «Ce 21 novembre, je découvre que vous ne signalez pas au comptoir d’entrée que les toiles suivantes présentées dans votre dépliant ne sont pas exposées : «Le sorcier d’Hiva-Oa» de Paul Gauguin et «La maison bleue» de Chagall. Or, cela fait plusieurs mois que ces deux toiles ne sont plus exposées dans votre musée : la première est présentée à la Fondation Pierre Gianadda de Martigny, du 10 juin au 22 novembre 1998 (cette œuvre illustre d’ailleurs l’affiche de cette exposition), et la seconde peut s’admirer à l’exposition consacrée à Marc Chagall dans la salle Féronstrée à Liège, du 25 septembre au 20 décembre 1998. J’aimerais donc savoir ce que signifie votre expression «je retiens votre idée de signaler...»».

La conservatrice qui avait mangé son chapeau ne répondra ni à cette lettre, ni à ses deux rappels, le dernier étant à nouveau envoyé en recommandé.
Solide leçon sur le «non droit» absolu de l’usager actif d’un établissement à vocation culturelle. Et sur l’importance de conquérir un simple acquis qui constitue la base indispensable pour tout début de dialogue : le droit pour le public de recevoir une réponse détaillée. A fortiori pour des lettres qui ne se contentent pas d’être plaintives mais qui détaillent des propositions de solutions réalistes et peu onéreuses, utiles pour l’ensemble des visiteurs.

Quant à la problématique concrète soulevée, j’ai eu l’occasion à la mi-juin 2008 de la soumettre publiquement à deux personnalités françaises de premier plan, en participant à «Vive la Culture !», le Forum du quotidien Libération organisé au Théâtre des Amandiers à Nanterre.
Au cours du débat Jusqu’où ira le mécénat?, Jean-Jacques Aillagon, ancien ministre de la culture, puis directeur du Château de Versailles, et Françoise Cachin, directrice honoraire des Musées de France, constatèrent que de plus en plus d’œuvres étaient prêtées ou louées à des tierces institutions muséales. À ma question de savoir s’il ne devenait pas évident, dès lors que le public devrait être informé avant d’acheter son ticket de ce qui était réellement exposé, ils constatèrent qu’effectivement il n’était plus adéquat de simplement signaler, comme cela se pratique actuellement, ces décrochages à l’endroit où lesdites œuvres auraient pu être admirées et qu’il faudrait trouver à l’avenir le moyen d’informer, dès le hall d’entrée du musée, de leur accessibilité ou non, au moins pour les œuvres maîtresses.
Encore faudra-t-il passer des déclarations aux actes (…)».

7. Les usagers des médias intéressent-ils si peu le CSA?

À l’occasion des festivités qui ont marqué les vingt ans du Conseil Supérieur de l’Audiovisuel (CSA), le journal économique L’Écho a publié ma carte blanche qui stigmatise combien cet organe de régulation sous-estime les usagers des médias au profit du «métier», et en privilégiant même les représentants du monde publicitaire.

Pour célébrer cet anniversaire, La Libre du 3 octobre 2017 a présenté dans un dossier de deux pleines pages intitulé «La parité entre professionnels et usagers au CSA?» mon interview face à celle du président du CSA, Dominique Vosters.

La question principale posée au responsable de l’organe de régulation se résume ainsi: le Collège d'avis du CSA émet des recommandations d'initiative ou sur demande du gouvernement ou du Parlement de la Communauté française. Il contribue ainsi à façonner notre paysage audiovisuel. Ne conviendrait-il pas que la composition de cet organe devienne paritaire et accueille autant de professionnels que d’usagers?

Dans sa réponse, Monsieur Vosters ne montra son intérêt que pour les professionnels du secteur et ne chercha aucune piste concrète qui pourrait permettre au public d’être mieux représenté: «Le Collège d'avis du CSA reflète les intérêts des divers représentants du secteur audiovisuel. Pas celui de l'intérêt général ou de l'intérêt du public. Créer un organe paritaire? Pour faire quoi? Et comment désigner les représentants des usagers? Par tirage au sort? (…) À ma connaissance, il y a très peu d'associations d'utilisateurs de médias audiovisuels ou de médias numériques. Comment représenter ce qu'on appelle la société civile?».

L’audiovisuel serait-il le dernier secteur où l’on évacue comme un gadget en quatre mots la thématique du tirage au sort?
Bien entendu, il n’est pas simple de décider qui va représenter les intérêts des usagers. C’est beaucoup plus facile pour «le métier» de se passer des avis de ces derniers mais le CSA n’aurait-il pas dû depuis longtemps en tant que régulateur de notre paysage audiovisuel se pencher sur cette thématique? Quasi tous les sujets liés à l’audiovisuel font l’objet d’études et de colloques initiés par lui, sauf une réflexion sur les causes de l’absence d’associations d’usagers dans ce secteur et surtout comment y remédier.

8. Un «caca nerveux» des Musées Royaux des Beaux-Arts de Belgique

Chaque jeudi jusqu’au 7 décembre 2017, le Conseil Bruxellois des Musées organise des nocturnes de 17H00 à 22H00, dans 68 musées différents (en moyenne 5 musées par semaine). Consultez le programme pour les prochaines semaines.

C’était au tour du Musée Wiertz, le 19 octobre 2017, mais seulement de 17H à 20H.
Sur la page facebook Brussels Museum, j’ai proposé le commentaire suivant:

«C'est très rare que la population active puisse découvrir ce musée car il est fermé:

  • tous les week-ends et les lundis,
  • les jours fériés,
  • du mardi au vendredi (ouvert de 10H à 17H), pendant le temps de midi.

Signez la pétition pour qu'il soit accessible et gratuit tous les week-ends (1.940 personnes l'ont déjà signée): https://www.change.org/p/michel-draguet-stop-à-l-asphyxie-de-musées-constantin-meunier-et-antoine-wiertz?recruiter=52544414&utm_source=petitions_show_components_action_panel_wrapper&utm_medium=copylink

Merci à Brussels Museum de ne pas avoir filtré mon message.
Par contre, très rapidement Fine Art Belgium (à savoir, les Musées Royaux des Beaux-Arts de Belgique) a réagi ainsi: «Et si vous faisiez quelque chose d'utile en réclamant plus de moyens pour les Musées Royaux des Beaux-Arts de Belgique afin qu'ils puissent ouvrir le Musée Wiertz les we? Hein dites?».

J’ai ensuite répondu ceci à Fine Art Belgium:

«Votre réponse autoritaire (on dirait un prof sermonnant en public un élève pour tenter de mieux l'humilier) qui tente de m'amoindrir démontre que vous n'avez même pas lu la pétition. Elle s'apparente donc, si c'est le cas, à de la malhonnêteté intellectuelle.

Je réponds donc ici à votre «Hein, dites». Vous vous adressez ici à plus de 1.900 signataires qui ne semblent pas à vos yeux faire quelque chose d’«utile» (vous les insultez aussi par votre réponse).
Quand autant de monde signe une pétition, on est au moins attentif à son contenu. Ce qui ne semble pas être votre cas. Dans cette pétition, ce que nous faisons d'«utile», c'est de proposer une solution concrète qui ne coûtera rien financièrement et qui permettra ainsi à la majorité du public de pouvoir visiter ce musée qui est un vrai joyau tous les week-ends. Une évolution positive qui ne réclame aucun moyen financier supplémentaire.

Il est clair que nos musées fédéraux manquent d'argent mais ce n'est pas une raison pour utiliser cet argument financier pour répondre à toutes les plaintes, et surtout celles qui proposent justement des solutions financièrement indolores. Cet alibi «fric» pouvant alors masquer des problèmes (et donc les entretenir) d'ordre bureaucratiques (ou peut-être problèmes d'égo, de pouvoirs personnels, etc.) qui, eux aussi, doivent être poursuivis et condamnés afin que nos musées respectent davantage le public (ici, la population active, soit plus de la moitié de nos concitoyens). Ceci était une autre «utilité» de cette réponse.

Je n'ignore pas que vous êtes une personne gentleman et que votre réponse suivante va nous prouver que vous êtes de bonne volonté (prêt(e) à débattre du fond) et qu'elle sera «utile».

À tous ceux qui nous lisent ici, voici, à propos de cette plainte, les questions concrètes qui restent sans réponse depuis près d'un an sur ce dossier précis.
Voir le point 6 dans le texte ci-joint:
http://www.entreleslignes.be/humeurs/consoloisirs/quand-les-mrbab-répondront-ils-enfin-à-nos-questions ».

Ces échanges se sont déroulés le 20 octobre 2017.
Dix jours plus tard, au moment de terminer la présente newsletter, Fine Art Belgium n’avait toujours pas répondu à mon interpellation. À découvrir ici.

9. Olivier Maroy, Philippe Manoeuvre… et Stéphane Bern

Olivier Maroy, l’ancien journaliste qui présentait le débat politique du dimanche midi sur La Une à la RTBF est désormais un parlementaire MR.
Lors de l’audition du collectif «La RTBF nous appartient», il a pris la parole notamment pour expliquer qu’il avait constaté dans son ancien travail qu’il était vrai que la publicité influençait notamment les programmes parce que les résultats de l’audimat étaient omniprésents. S’il a considéré comme utopique la suppression de la publicité, il a néanmoins marqué son accord sur la dangerosité toute particulière du placement de produit et qu’il serait important de l’interdire sur les antennes du service public.

La publicité influence-t-elle le contenu même des programmes? Tout le monde n’est pas d’accord bien entendu avec ce point de vue (notamment les responsables des régies publicitaires, du moins quand ils s’expriment en public).
Personnellement, j’y crois fermement depuis une bonne vingtaine d’années, et à tel point que j’en ai fait un de mes combats principaux.

La situation s’aggrave, année après année. Par rapport à ce problème majeur, aucune solution globale n’est proposée par notre monde politique francophone belge. Pourtant c’est loin d’être impossible puisque cette publicité est bannie des télévisions publiques notamment en Flandres, en Grande Bretagne, en Espagne ou après 20H en France.

Le témoignage d’Olivier Maroy m’a donné envie de faire le point dans cette lettre sur les déclarations les plus récentes qui prouve cette influence de la publicité, et donc de l’audimat, l’outil pour tarifer cette dernière.

Voici deux exemples relevés en France au cours du mois d’octobre 2017.

Sur Europe 1, Philippe Manoeuvre, l’ancien juré durant trois ans de La Nouvelle Star, a expliqué les raisons pour lesquelles il ne rempilait pas. Parmi celles-ci: «Le but de cette émission? Tout le monde vous dira que c’est trouver des chanteurs. Pas du tout! Ce sont des émissions qui sont des magnets à publicité. On voit des publicités pour des gels pour les cheveux, pour des produits anti-acné, des publicités de d’jeun’s».

Dans sa chronique Médiatiques qui parait dans Libération (16 octobre 2017 page 27), Daniel Schneidermann explique pourquoi les émissions axées sur l’Histoire de France sont principalement consacrées à des monarques et à leurs favorites… et moins de 10% d’entre-elles à des personnalités ou des lieux liés à la République. Stéphane Bern (France 2) explique: «(…) C’est simple, pour Louis XVI  – Louis XVI, il n’est tout de même pas si populaire! – nous avons fait 4,5 millions de téléspectateurs. Pour Clémenceau: 2,5 millions. Danton et les femmes dans la révolution, cela a été pire…».

Les témoignages qui décrivent l’évolution de la RTBF sous influence publicitaire s’accumulent au fil des années. Je pense que plus d’un parmi les lecteurs de Consoloisirs vont s’intéresser à ce que j’écrivais déjà à ce sujet dans mon livre publié en 2006 chez ADEN, «La RTBF est aussi la nôtre»:

- 1: (…) À la veille de son départ à la préretraite, dans un entretien accordé à Xavier Diskeuve pour Vers l’Avenir (29 septembre 2003), Henri Sonet, chroniqueur cinéma et responsable de la revue de presse de Matin Première pendant près de vingt ans, pronostique un avenir particulièrement sombre : «La RTBF de demain ne sera plus vraiment un service public. Le caractère administratif restera mais les programmes seront plus futiles. Ce sera une sorte de ministère du divertissement même si l’info du JT et les journaux parlés en radio demeureront des bastions soutenus...».

- 2: La régie publicitaire de la RTBF influence-t-elle les programmes de ses chaînes de radio ou de télévision? Pierre-Paul Vander Sande, administrateur délégué qui précéda Yves Gérard aux commandes de la RMB, déclarait à Pierre-François Lovens, dans La Libre Belgique du 16 mars 2001: «Faire porter à la régie publicitaire la responsabilité de décisions en matière de programmation de la RTBF est une fausse affirmation... C’est un type d’affirmation qui émane souvent de l’intérieur de la RTBF, à savoir de gens qui — à juste titre ou non — estiment avoir été maltraités. Soit parce qu’on les a empêchés de réaliser un projet d’émission, soit qu’on ait supprimé leur émission. La RMB joue alors le rôle de bouc émissaire idéal: c’est la faute à l’audience et à la pub...».

- 3: Pourtant, nombre de projets rédactionnels ertébéens sont induits non par les besoins des usagers mais bien par la recherche de rentrées publicitaires. Ainsi, Christian Druitte, en tant qu’administrateur général de la RTBF, envisageait de créer un journal télévisé du matin. Au journal parlé de 7H, le 24 juin 1997, il expliqua : «Il faut saturer les possibilités que nous donne la publicité. Il faut encore aller chercher pour 200 millions (de FB) et chaque franc sera le bienvenu. Il faut ouvrir d’autres créneaux. Par exemple, la télé du matin».

- 4: Stéphane Dupont propose, depuis plusieurs décennies, dans son émission de radio La quatrième dimension, désormais diffusée à l’heure du brunch dominical, des reportages sonores dans lesquels de simples citoyens parlent de leur vécu quotidien.
L’animateur-réalisateur constate que les dirigeants de la RTBF marquent «un désintérêt total» pour son initiative tant éloignée du format music and news : «car cela ne rapporte pas immédiatement !» (Le Soir, supplément ZAP, entretien de Mathieu Demaude, 31 juillet 2004).

- 5: Au cours de l’émission Mise au point du 4 février 2001, le journaliste de La Libre Belgique, Pierre-François Lovens, a rappelé que Jean-Pierre Gallet, le directeur de l’information à la RTBF, avait déclaré à son quotidien que c’était «la RMB qui avait coulé À bout portant», l’interview politique du vendredi soir animée naguère par Alain Gerlache. Christian Druitte lui répondit en tentant d’expliquer que cette émission avait, par la suite, trouvé sa succession dans Signé dimanche... mais l’administrateur général de la RTBF ne proposa aucun argument pour réfuter cette déclaration de Mr Gallet !

- 6: Même Claude Delacroix, alors qu’il dirigeait les radios de la RTBF, déclarait à propos de la publicité : «...C’est un mal nécessaire mais c’est un mal. Pour la RTBF, il eut mieux valu qu’elle n’ait pas la pub et que la dotation suffise. La pub est un appoint financier qui pollue l’antenne...» (entretien avec Fernand Letist, Le Soir, 28 septembre 2002).

- 7: Et faut-il rappeler que Claude Delacroix succéda à Etienne Sévrin, lequel, lorsqu’il démissionna de son poste de directeur de la radio, le 20 janvier 1997, affirma ne plus pouvoir accepter le rôle croissant accordé à la RMB dans la stratégie des radios de la RTBF...

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- 8: Pour François Heinderyckx, professeur à l’ULB : «Même s’il y a moins de publicités sur la RTBF que sur RTL TVI, la pression publicitaire ressentie par le téléspectateur est quasiment similaire. Aux heures de grande audience, le téléspectateur moyen subit une pression publicitaire aussi dans les procédés utilisés. La RTBF n’accepte pas ce reproche lorsqu’on l’accuse d’être de plus en plus soumise à l’audimat et de faire dicter sa programmation par la régie publicitaire mais certaines choses sont difficilement acceptables. Exemple : programmer plusieurs météos — «européenne» puis «belge» — avant et après le journal télévisé et saucissonner le tout par de très longs écrans publicitaires, cela ne se fait même pas sur les chaînes privées !» (La Libre Belgique, entretien de Nicolas Ghislain, 31/10/2003).

- 9: Le 24 août 2005 vers 8H35, dans l’émission de radio Matin Première, la séquence Questions Publiques est consacrée à la RTBF.
Un auditeur regrette qu’il ne peut entendre la station Pure FM.
Françis Goffin, le directeur de la radio, lui répond que «c’est une bonne question» et que la diffusion de ce «nouveau programme» n’est pas parfaite et qu’il y a, par exemple, «un véritable problème» sur la Province du Luxembourg.
Où se situe donc l’influence publicitaire dans cet exemple? La RTBF peut diffuser «au maximum» cinq chaînes de radio mais rien ne l’oblige à en aligner autant, sinon la recherche de cibles précises d’auditeurs pour les offrir aux publicitaires ! Elle favorise donc la quantité de programmes diffusés au confort d’écoute de certains de ses usagers. Ainsi, elle trahit l’esprit du texte du décret de 2003 qui précise son statut : sa «mission de service public est assurée en priorité par une offre public, notamment à l’ensemble des francophones de Belgique, de programmes de radio et de télévision (...) qui permet d’assurer l’accès à des conditions respectant le principe d’égalité entre les usagers, à tous les programmes généraux et spécifiques de l’entreprise correspondant à sa mission de service public» (chapitre 1, article 3) (…)».

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