Présumées coupables ?

Pérégrinations

Par | Journaliste |
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L'anarchiste Germaine Berton en 1921 accusée d'assassinat. Photo : Archives de la Préfecture de police de Paris

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Les “Archives Nationales” ne sont pas l’endroit le plus glamour de Paris. Évidemment il s’y trouve des tonnes de documents forts intéressants, lesquels, sélectionnés par thématique, peuvent dès lors attirer un public très diversifié.

C’est le cas de l’exposition Présumées coupables, du XIVème-XXème siècle, titre-choc sur le mode affirmatif et d’une actualité encore très présente. Cette exposition à la documentation foisonnante est articulée en cinq volets passionnants. Par ordre chronologique, viennent d’abord les sorcières aux 16e et 17e siècles, même si l’esprit de la chasse aux sorcières plane encore de nos jours. Après le diable, les juges traquent les empoisonneuses, femmes “sournoises” menaçant l’ordre social. Les infanticides – souvent des femmes en détresse - sont un autre archétype du mal féminin. Pour suivre, un volet est réservé aux pétroleuses, anarchistes de la Commune de Paris, et enfin, pour clore le sujet des présumées coupables, un chapitre est dédié aux traitresses à la patrie, à l’instar de ces femmes tondues lors de la Libération, images toujours présentes dans nos mémoires.

Ainsi, les danses au sabbat des sorcières ou les crimes définis comme atroces ponctuent six siècles d’actualité judiciaire, dont les juges étaient immanquablement des hommes aux a priori désastreux et tout aussi imperméables à la détresse des femmes.

Les archives des interrogatoires constituent la base de l’exposition. La plupart des documents sont illisibles à cause des problèmes paléographiques et linguistiques (latin et dialectes européens). Aussi des extraits de ces quelque 320 procès-verbaux sont agréablement présentés numérisés sur écran et traduits avec accompagnement sonore. Parmi ces femmes appelées en justice, et parmi toutes les destinées fragiles auxquelles le visiteur est confronté, les procès pour infanticides sont particulièrement interpellants et tragiques. Bien sûr, les “auditions de bouche”, les confrontations de témoins et notes diverses détaillant les aveux sous la torture, concernent aussi des figures célèbres de la violence au féminin, coupables ou non. Par exemple Jeanne d’Arc, La Brinvilliers, Violette Nozière ou Arletty retiennent d’office l’attention.

Par ailleurs, ces témoignages sont environnés d'une iconographie nourrie montrant à travers les âges des stéréotypes qui entourent les femmes jusqu’à nos jours

Pour compléter cette exposition fort intéressante et pas du tout rigolote, les Archives Nationales ont publié un ouvrage exhaustif et agréablement documenté qui permettra aux intéressés de compléter leur information sur ce sujet complexe.

Présumées coupables, XIVème - XXème siècle.  aux Archives Nationales, Hôtel de Soubise, 60, rue des Francs-Bourgeois, 75003  Paris. Jusqu’au 27 mars 2017.

Présumées coupables, les procès faits aux femmes . Editions de L’Iconoclaste - Les Archives Nationales. Préface d’Élisabeth Badinter. 308 pages, 25€.

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Autres informations : www.archives-nationales.culture.gouv.fr/

 

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