De l’Himalaya à l’Arctique entre Digne et Bruxelles

Pérégrinations

Par | Journaliste |
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Univers glacé d’une expédition Arctique : La Lune est blanche (2014) © Emmanuel Lepage

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Voyager, la belle affaire ! Ne glosons pas ici sur ce qui, oui ou non, mérite le terme de voyage, et, sous peine de recevoir des bordées, ne soulevons surtout pas la manière utilisée pour se déplacer. Du reste, les deux cas d’explorateurs que j’évoque ici ne sont pas suspects d’avoir cédé aux sirènes du tourisme. Manifestement, je ne prends aucun risque en évoquant l’audacieuse aventurière que fut Alexandra David-Néel et dont j’ai eu l’occasion de visiter la maison qu’elle occupa longtemps pour y décéder à plus de 100 ans. J’imagine que, là où elle se trouve, elle a dû sourire de me voir embarrassée en cherchant son domicile à Digne-les-Bains, car son adresse, soit avenue du Maréchal Juin, 27, n’était, il y a un mois, pas répertoriée dans les données GPS, ce que j’ai découvert a posteriori. Fatiguée de me perdre, ce n’est qu’en m’adressant à un passant que j’ai pu arriver à destination in extremis pour la dernière visite de la journée. Réservations obligatoires. 

Impossible de présenter Alexandra David-Néel en quelques lignes. Ses diverses Mémoires et ses Études philosophiques aux rééditions multiples sont là pour éclairer les amateurs. Pour d’autres, il y a moyen d’aborder cette exploratrice via un album BD en trois tomes Une Vie avec Alexandra David-Néel, signé par Mathieu Blanchot et Fred Campoy. 

De mon côté, puis-je juste rappeler qu’elle fut très tôt passionnée par le bouddhisme et par les langues orientales et qu’elle devait quadriller l’Inde, la Chine, le Japon, la Corée et, enfin, sous un déguisement, pénétrer au Tibet au risque de sa vie, ce pays étant alors interdit aux étrangers. En 1911 elle se lança dans un premier « voyage » qui dura 14 ans, et qui, outre ses conférences en Europe, fut suivi d’un autre, plus court, ce qui est, en parlant d’Alexandra David-Néel, très relatif ! 

Sa maison qu’elle baptisa Samten-Dzong ou « Forteresse de la méditation », était orientée vers les Alpes de Haute Provence, « un Himalaya pour Liliputiens" disait-elle. Ce qui est surprenant dans cette villa anglo-tibétaine de Digne-les-Bains, ce n’est pas la fameuse salle de méditation où elle recevait ses visiteurs ou bien se mettait en scène (ne serais-je pas mauvaise langue?) pour des interviews. Mais reconnaissons que ce choix était certainement du meilleur effet, vu que, hormis ce salon où sont amassés quantité d’objets ramenés de ses pérégrinations, le reste de l’habitation est étonnamment quelconque. Sachant que cette intrépide personne avait décidé de tous les aménagements et de la décoration des lieux, c’est là un étonnant grand écart. 

De retour à Bruxelles, mon regard plonge sur une annonce : Emmanuel Lepage, L’Explorateur , titre d’une exposition ouverte au public à partir du 1er octobre, au Musée de la Bande Dessinée. Exploration, voyage… Je m’y précipite pour découvrir l’événement qui marque le 30e anniversaire de ce Musée exceptionnel. Emmanuel Lepage n’est forcément pas un explorateur à la manière de David-Néel, du reste, le moule est cassé. Au vu de son oeuvre, Emmanuel Lepage me semble plutôt incarner un exemple moderne de « tribulateur » qui exerce sa curiosité pour partager l’émotion de la découverte par l’art. Ici le dessin puis la structuration du récit en planches en couleurs directes, obligent l’intérêt. Ses albums oscillent entre carnets de voyage, illustrations, bande dessinée de reportage. Passionné de marine et d’Histoire, on y voit beaucoup de navires, ceux que l’on croise, par exemple, dans  Les Voyages d’ Ulysse  ou dans  Les Voyages de Jules  aux accents épistolaires. Il y a aussi les paysages glacés de  La Lune est blanche, réminiscence d’une expédition à bord de l’Astrolabe en Arctique. Enfin, les cimaises laissent une bonne place à une oeuvre plus singulière qui rend compte de la catastrophe de Tchernobyl, avec ses conséquences pour la population. À l’instar du Musée de la Bande Dessinée, Emmanuel Lepage, compte trente ans de florissante carrière, ce qui offre au public un double prétexte pour se rendre en plein coeur de Bruxelles. 

Emmanuel Lepage, l’Explorateur : Jusqu’au 8 mars 2020. Musée de la Bande Dessinée, rue des Sables, 20, 1000 Bruxelles, Belgique. Week-end anniversaire, animations les 5 et 6 octobre. Ouvert tous les jours de 10 h  à 18 h. Infos : https://www.cbbd.be

Alexandra David-Néel : Samten Dzong,  27, avenue du Maréchal Juin, 04000 Digne-les-Bains, France. Infos : https://www.alexandra-david-neel.fr

 

 

 

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Salon tibétain d’Alexandra David-Néel ©Ville de Digne-les-Bains

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