« De père et de mère … »

Confidences du chauffeur du Ministre

Par | Penseur libre |
le

Des chiens et leurs propriétaires en attente de vaccination contre la rage canine à Kinshasa. Photo Radio Okapi

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Lecture 2 min.

Panique dans la famille de Son Excellence Monsieur le Ministre d’Etat, mon honorable patron : le chien de garde a disparu ! Disparu, le bulldog au nom évocateur de « Kata-Kata » ; disparus les aboiements nocturnes et menaçants, et les grognements matinaux d’appels au réveil. Suspense : fugue d’un mâle en chaleur et en manque ? Caprice d’un animal en quête de liberté et de vagabondage comme tous les chiens enfermés ? Ou alors psychose à la suite des rumeurs persistantes concernant la traque des quadrupèdes par des mangeurs de viande canidée ?

Des jours passent et pas de nouvelles de Kata-Kata. C’est alors que mon patron de ministre a sollicité mon concours de fin limier, pour ainsi dire, en vue de renforcer les recherches.

C’est justement au cours de ces recherches laborieuses que j’apprends l’insolite : seuls les chiens « indigènes de père et de mère », chiens appartenant en général aux bidonvilles d’en-bas, ont droit à la protection et à la survie. L’opération de la « boucherie » contre les chiens de race ( pour le moins sélective) a pour code la « canitude ». Et donc pas de berger allemand, pas de bulldog anglais, pas de labrador, pas de berger américain, pas de bouvier bernois, pas de berger belge malinois, pas de doberman, etc., c’est-à-dire pas de chiens au sang à moitié importé sur la place publique, sinon à la boucherie ! Sont épargnés, les chiens indigènes « sang-pour-sang ». Pauvres chiens indigènes des bidonvilles : de pedegree de carnivores, ils sont devenus, avec la crise, d’abord des multivores, puis à présent des herbivores. Ces derniers nous sont, n’est-ce pas, des chiens naturels de compagnie…

… Mais l’histoire-là s’est achevée de triste manière. Mes recherches sur la disparition de Kata-Kata se sont révélées vaines, jusqu’au jour où le gérant de notre nganda-bar m’a appelé en toute urgence et m’a annoncé, ô surprise, qu’il avait retrouvé la trace du fameux bulldog ; le chien en fuite, perdu et éperdu, s’était terré au fond du comptoir par crainte de représailles. Bien plus, il a facilement convaincu d’autres chiens congénères et « mélangés » de trouver abri au nganda-bar, rare oasis de paix du quartier. Conséquences : la clientèle habituelle des ambianceurs, dans sa majorité superstitieuse, a déserté les lieux.

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Et la nouvelle de cet exode massif et « mystique » (comme disent les Kinois..), a alerté les chasseurs de chiens de race.

Désormais, tous les matins, des groupes de ces chasseurs se rassemblent devant le nganda-bar, avec des tambourinements provocateurs de casseroles, pour réclamer au gérant de leur livrer leur « boucherie » bulldoguée…

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