Quand la nuit tombe sur le grand hôpital, images de Roger Job
Chemins de traverse par Marcel Leroy, le 08 mars 2023

Droit à l'âme du CHwapi, le grand hôpital de Tournai. Photo © Marcel Leroy
En août 2023, après des années de travaux, la Maison de la Culture de Tournai poursuivra le travail jamais interrompu, malgré les aléas du chantier. Ce qui explique pourquoi les photos du journaliste Roger Job s'exposent aujourd'hui sur les murs nus d'une coursive qui pourrait être celle du sous-sol d'un grand hôpital. Brut de décoffrage. Pas de fioritures. Dans ce couloir on fait face à des images et à des textes. Ces derniers, rédigés d'après les paroles de gens qui se sont confiés, renforcent la grâce d'un labeur qui demande une rare humanité. Le plus souvent cachée.
Job, en reporter-artisan, se rend tous les mois depuis deux ans au CHwapi. Le Centre Hospitalier de Wallonie Picarde est situé à Tournai. Le reporter y travaille pour garder trace des efforts accomplis par des personnes aux pratiques diverses, infirmières, toubibs, techniciennes de surface, cuistots, blanchisseurs et autres. Ses images nous emmènent dans le labyrinthe de l'hôpital comme on se hasarde dans une ville. Elles nous confrontent à un micrososme qui reflète la société et notre temps. Il faut de la patience et de la constance pour laisser se dessiner les choses.
Qu'il balade son appareil en Belgique ou ailleurs, le photojournaliste écrit toujours sur les murs qui lui sont prêtés un reportage qui ricoche par une publication dans un journal, un magazine ou un livre. Cette voie s'apparente aux écritures urbaines, c'est du journalisme dans la rue, serti dans la trame de ces années-ci, où , lors de la pandémie du covid, le rôle majeur des institutions hospitalières a été mis en lumière. Mais les ténèbres ne doivent pas retomber sur les défis qui s'y relaient nuit et jour.
C'est ce qui a poussé l'équipe de la Maison de la Culture à réaliser, dans la mouvance de la mission photographique de Roger Job au CHwapi, une sorte de festival pour tenter de faire le tour du monde de la santé, avec du théâtre, des documentaires et des débats, tant pour les étudiants que pour le grand public. Aussi, l'autre soir, passant du couloir où veillent les documents photographiques à la salle de spectacles, on s'est quasi glissé dans les coulisses d'un hôpital avec les comédiens de la Compagnie Adoc. "Urgence" , qui est au fond un documentaire de forme théâtrale, aide à réfléchir à la santé publique au sens le plus large. Ce qui va de la prévention à l'environnement, de l'alimentation à la culture, et à l'urgence de s'exprimer sur ce qui est vécu.
Avant d'entrer dans cette Maison de la Culture qui ouvre tant de fenêtres sur notre époque, après être passé devant l'hôpital dont l'expo de photos nous rend proches, il y eut cette dérive, ces pas perdus dans la cité. Avec l'Escaut qui court vers l'horizon, les rues bordées de maisons qui semblent issues des romans de Jean Ray, le déferlement coloré des étudiants après les cours et la paix de la cathédrale avec ses vitraux laissant filtrer le ciel chargé de neige et enfin les rayons chargés d'une librairie où le tic-tac des aiguilles retenait son souffle. Comme parfois quand on se laisse emmporter par une photo, une peinture, un livre une sculpture ou un film.
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